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LE RESTE EST SILENCE…

trois. C’était moi qui portais triomphalement ce trophée de corolles…


Le lendemain matin, maman sortit seule et revint avec un bouquet de violettes au corsage. Elle le mit dans un verre de Venise, en face de la grande gerbe de la veille.

Quelques jours après, toutes les fleurs étaient fanées. Ma mère jeta les chrysanthèmes sans regret ; mais, quand vint le tour des violettes, elle les sécha avec sollicitude, les tamponna et les enferma dans un petit coffret oblong de laque noire, — un de ces coffrets japonais où l’on tient des gants et où une mousmé grasse sourit sous un pin d’or, qui a des nœuds en relief sur son tronc svelte et des aiguilles plus fines que des cheveux…

Je l’ai retrouvé, l’autre semaine, dans un tiroir, ce vieux bouquet. Fleurs ni feuilles n’étaient plus visibles. C’était une pauvre chose jaunie, inutile, flétrie, crispée, ayant une odeur de poussière. — Je le brûlerai quelque soir…