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des bouffons, des coiffeurs, des parfumeurs, des antiquaires, des marchands de bijoux, des entremetteurs. Cette clique était à mes ordres. Quand ils en apercevaient des membres quelque part, les gens disaient : « Voici la coterie de Cornwallis ! » Eux, du moins, ne dépassaient pas les limites morales que je leur attribuais. Me taisais-je, ils respectaient mon silence. Dans nos réunions, au fond de quelque bouge, si je marchais de long en large devant eux, sans écouter leurs grossiers propos, en proie à quelque sombre pensée, ils ne m’interpellaient pas pour me dire : « Qu’avez-vous ? Pourquoi ce silence ? Êtes-vous triste ? » Ils respectaient ma liberté. J’avais en eux des courtiers de frivolités, de plaisirs et de vices : ils me plaisaient plus que des pasteurs ! Certaines dames catholiques ne se déplaceraient pour rien au monde, si leur aumônier ne les suivait pas. Moi, je traîne un coiffeur qui ne m’a jamais quitté ! Il m’aime comme un chien qu’il est. Petite May, petite May, la terre est un damné désert où rôdent des chacals et des hyènes.