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LE RESTE EST SILENCE…

rejetai les couvertures et sautai à bas de mon lit…

Quand j’entrai dans la salle à manger, mon père y était encore. Assis devant sa tasse vide, il avait les yeux rouges, la paupière cernée, les traits tirés et vieillis. Nous nous embrassâmes.

— Tu as un peu dormi, mon petit ?

— Mais oui, et toi, papa ?

— Moi aussi, fit-il, et il mentait avec un bon sourire.

Nous parlâmes de choses indifférentes, mais je voyais bien qu’il voulait me demander quelque chose et qu’il n’osait pas. Il se hasarda enfin :

— Dis-moi, Léon, personne ne venait ici, quand je n’y étais pas, — que tu ne connaisses pas ?

— Personne, papa.

— Et, quand vous sortiez, vous ne rencontriez personne ?

— Personne !

Je pensai bien un peu au monsieur du parc, à celui dont la canne avait pour manche une tête d’aigle, mais nous ne l’avions