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LE RESTE EST SILENCE…

tenons notre respiration. N’est-ce pas elle qui va entrer ? Et, chaque fois, c’est une désillusion nouvelle. Et nous retombons dans le désarroi, avec l’impression morbide que tous ces gens que nous ne connaissons pas se sont coalisés absurdement contre nous, pour nous ravir lentement notre chancelant espoir, — en qui peut-être d’ailleurs n’avons-nous pas foi nous-mêmes !

— Petit, il faut aller te coucher !

Comme mon père me parle avec douceur ! Jamais il n’a employé une voix aussi tendre en s’adressant à moi. Mais non, je ne veux pas me coucher, je resterai là, sur ce canapé. Pourquoi ? Est-ce par caprice ? Par frayeur ?

— Si maman arrive, je veux l’entendre de suite.

— Tu l’entendras aussi bien de ton lit.

— Non. Et puis, je préfère rester avec toi. Est-ce que tu vas te coucher ?

— Plus tard, plus tard !

— Eh bien, moi aussi, j’irai plus tard.

Il n’ose pas me contrarier. Élise a disparu. Un à un, les bruits de la maison se