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LE RESTE EST SILENCE…

inquiet, ton père. La moindre chose le choque, l’irrite…

— Qu’est-ce que ça peut lui faire ?

— Oh ! rien, mais cela l’ennuie, tu comprends !

Je ne comprenais pas et je me demandais pourquoi papa m’avait déjà demandé si nous ne rencontrions jamais d’hommes, maman et moi. Oui, nous en rencontrions, il paraît, mais quelle importance cela pouvait-il avoir ? Et il me parut que les grandes personnes se créaient des soucis bien ridicules, et que, si les enfants avaient la même liberté qu’elles, ils sauraient en profiter davantage.

Mais mon père, le soir, ne nous questionna pas. Il était plus morose que d’habitude, et ma mère se montra, au contraire, aussi affable et enjouée que possible. Elle ne se révélait ainsi que très rarement, et j’eus un rapide soupçon qu’elle ne l’était que lorsqu’elle avait rencontré, l’après-midi, dans un beau jardin, quelque ami de madame de Thieulles.