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L’ÉCOLE DES MARIAGES

M. Diamanty disait vrai, si Mme Guitton se trompait ? Comment savoir ? Serait-il possible qu’il devînt un jour l’instrument de la mort d’Edmée ? Des gouttes de sueur lui poussèrent aux tempes. Pourtant, ces réflexions passaient sur lui comme des cauchemars. Elles le troublaient profondément, mais il ne croyait pas à leur réalité.

Dans ce doute, il se rejeta d’instinct vers ce qui lui semblait la sécurité, l’appui moral, — c’était en ce moment Sunhary.

— Voyons, Georges, fit-il, avec angoisse, mets-toi à ma place… Que ferais-tu ? Conseille-moi, Je voudrais… je voudrais…

— Quoi ? s’écria Sunhary, que voudrais-tu ?

Et il retomba, accablé, sur son fauteuil, la tête dans ses grandes mains brunes. Le calme et flegmatique Georges souriait de la terreur de son ami. Peut-être alors eut-il le désir d’empêcher ce mariage. Il n’en fit rien. Il se trouvait sur la piste d’une découverte psychologique, il se souciait bien de Delville ! Il avait, au fond, la cruauté froide et précise des expérimentateurs, qui sacrifieraient tout à leur manie de science. Il haussa les épaules :

— Tu es insupportable avec tes indécisions ! Si tu as peur, n’épouse pas Edmée. Si tu as assez de courage, épouse-la… Mais dispense-moi du spectacle démoralisant de ta veulerie. Il n’est point permis d’être mou et lâche à ce point…

L’injure porta. Comme tous les faibles, René avait horreur qu’on lui reprochât de l’être. Il se raidit, traita ses doutes de pusillanimités et se promit dorénavant plus de courage.

— Je ne suis pas si lâche que ça, déclara-t-il non