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L’ÉCOLE DES MARIAGES

elle vieille ? Mme Guitton avait quarante-huit ans, mais elle paraissait beaucoup plus âgée à René), avec une vivacité inattendue chez une femme aussi grosse, roula un siège près de Delville et s’écria affectueusement :

— Allons, mon enfant, ne faites pas tant de simagrées Racontez-moi vos malheurs.

René s’écria, tout d’une pièce :

— Je ne peux pas épouser Edmée Diamanty.

Si René Delville avait été observateur et si la souffrance qui le ravageait depuis la veille lui avait permis de regarder ailleurs qu’en lui-même, sans doute eût-il pu s’étonner de voir qu’à cette désastreuse nouvelle, quelque chose comme un pétillement de joie avait étincelé dans l’œil vif, rond et mobile de Mme Guitton. Mais elle reprit aussitôt sa voix cordialement bourrue pour s’écrier :

— Qu’est- ce qui se passe, mon pauvre garçon ?

Alors René Delville fit un récit passablement embrouillé de son entrevue avec M. Diamanty. Oubliant tout ce qu’il avait promis au père d’Edmée, il raconta comment les appréhensions et les pressentiments de la jeune fille s’étaient réalisés et comment M. Diamanty lui avait appris son refus formel. Mme Guitton écoutait ces explications avec un grand intérêt.

René, incapable de silence et de réserve sur ses sentiments, avait, depuis longtemps, mis Mme Guitton au courant de son amour pour Edmée. Elle possédait, il est vrai, quelques droits à cette confiance. Depuis la mort de Mme Delville, qui était son amie intime, comme elle avait été celle de Mme Diamanty, elle avait constamment pris soin