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Quelques arbres fruitiers, cherchant à s’élever
Le long d’un mur orné de feuillage vert-tendre ;
Des zigzags de gazon qui pousse et semble attendre
Les baisers du soleil ; cinq ou six pots de fleurs ;
Une maison très-simple, aux joyeuses couleurs,
Aux rideaux de percale, aux persiennes voyantes,
Où montent en festons quelques plantes grimpantes ;
Un banc où le poëte aimerait à s’asseoir :
C’est tout. — Ici le sang aura coulé ce soir.

Que veut donc cette foule ardente, furieuse,
Traînant, poussant, portant, comme une mer houleuse,
Deux hommes, menacés par cent poings frémissants :
Un vieillard, — un soldat ? Des cris assourdissants
Partent de tous côtés, se croisent sur leurs têtes,
Qu’ombrage un triple rang de sombres baïonnettes.
« À mort ! à mort ! dit-on. — Il fait tirer sur nous !
« Plus de traîtres ! — Vengeance ! » Et, comme le remous
Du flot qui sur le roc en déferlant se rue,
La foule en grossissant escalade la rue.
Voyez, ils sont entrés. Porte, escalier, cloison,