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S’envoler au hasard de son aile lassée !
Dans ces moments trop courts, qu’il est doux de revoir,
À la pâle clarté de la lampe du soir,
Près du foyer brillant où la flamme pétille,
Cette moitié de vous qu’on nomme la famille !
Que le nom de l’absent est souvent prononcé !
Comme on parle de lui ! Lorsque le vent glacé
Vient tristement pleurer le long de la fenêtre,
On se dit l’un à l’autre : « Où donc peut-il bien être ?
Dort-il ? Est-il debout ? A-t-il froid ? A-t-il faim ? »
Et chacun, pour cacher aux autres son chagrin,
Se tait, et, soupirant, se dit : « Vit-il encore ? »
Et puis c’est le vieux chien dont le regard implore,
Réclame une caresse, et qui rôde, et qui sent
La place qu’occupait jadis le maître absent,
Où, près de lui dormant des heures tout entières,
Il rêvait à loisir de ses chasses dernières
Et des nombreux combats qu’en des temps plus heureux
Dans la plaine et les bois ils livraient tous les deux.

Tel était le tableau qui me venait à l’âme.

J’oubliais tout : le sang, et le fer, et la flamme,