Page:Jacques Collin de Plancy - Dictionnaire infernal.pdf/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
BEL
BEL
— 88 —

assis dans un char de feu ; il parle avec aménité ; il procure les dignités et les faveurs, fait vivre les amis en bonne intelligence, donne d’habiles serviteurs. Il commande quatre-vingts légions de l’ordre des Vertus et de l’ordre des Anges. Il est exact à secourir ceux qui se soumettent à lui ; s’il y manquait, il est facile de le châtier, comme fit Salomon, qui l’enferma dans une bouteille avec toutes ses légions, lesquelles font une armée de cinq cent vingt-deux mille deux cent quatre-vingts démons. Il fallait que la bouteille fût de grande taille.

Mais Salomon était si puissant que, dans une autre occasion, il emprisonna pareillement six mille six cent soixante —six millions de diables qui ne purent lui résister. — Des doctes racontent encore que Salomon mit la bouteille où était Bélial dans un grand puits, qu’il referma d’une pierre, près de Babylone ; que les Babyloniens descendirent dans ce puits, croyant y trouver un trésor ; qu’ils cassèrent la bouteille, que tous les diables s’en échappèrent, et que Bélial, qui avait peur d’être repris, se campa dans une idole qu’il trouva vide, et se mit à rendre des oracles ; ce qui fit que les Babyloniens l’adorèrent.

Bélias, démon invoqué comme prince des Vertus dans les litanies du sabbat.

Beliche. C’est le nom qu’on donne au diable à Madagascar. Dans les sacrifices, on lui jette les premiers morceaux de la victime, avec la persuasion qu’il ne fait point de mal tant qu’il a de quoi mettre sous la dent.

Bélier. Le diable s’est quelquefois transmué en bélier, et des maléficiés ont subi cette métamorphose. C’est même sur une vieille tradition populaire de cette espèce qu’Hamilton a bâti son conte du Bélier.

Il paraît que le bélier a des propriétés magiques ; car, lorsqu’on accusa Léonora Galigaï, femme du maréchal d’Ancre, d’avoir fait des sorcelleries, on prétendit que, pendant qu’elle s’occupait de maléfices, elle ne mangeait que des crêtes de coq et des rognons de bélier.

Pour l’influence du bélier, signe du zodiaque, voyez Astrologie et Horoscopes.

Belin (Albert), bénédictin, né à Besançon en 1610. On recherche parmi ses ouvrages:1° le Traité des talismans, ou Figures astrales, dans lequel il est montré que leurs effets ou vertus admirables sont naturels, ensemble la manière de les faire et de s’en servir avec profit, in-12, Paris, 1671. On a joint à l’édition de 1709 un traité du même auteur, de la Poudre de sympathie justifiée ; 2° les Aventures du philosophe inconnu en la recherche et invention de la pierre philosophale, divisées en quatre livres, au dernier desquels il est parlé si clairement de la manière de la faire que jamais on en a traité avec tant de candeur. In-12 ; Paris, 1664 et 1674.

Belinuncia, herbe consacrée à Belenus, dont les Gaulois employaient le suc pour empoisonner leurs flèches. Ils lui attribuaient la vertu de faire tomber la pluie. Lorsque le pays était affligé d’une sécheresse, on cueillait cette herbe avec de grandes cérémonies. Les femmes des druides choisissaient une jeune vierge ; suivie des autres femmes, elle cherchait l’herbe sacrée ; quand elle l’avait trouvée, elle la déracinait avec le petit doigt de la main droite ; ses compagnes coupaient des branches d’arbre et les portaient à la main en la suivant jusqu’au bord d’une rivière voisine ; là, on plongeait dans l’eau l’herbe précieuse, on y trempait aussi les branches, que l’on secouait sur le visage de la jeune fille. Après cette cérémonie, chacun se retirait en sa maison ; seulement la jeune vierge était obligée de faire à reculons le reste du chemin.

Belkis.Voy. Balkis.

Belladone, plante qui donne des vertiges et peut empoisonner. Les magiciens s’en servaient.

Belloc (Jeanne), sorcière du pays de Labourd, prise à vingt-quatre ans, sous Henri IV. Pierre Delancre, qui l’interrogea, dit qu’elle commença d’aller au sabbat dans l’hiver de 1609 ; qu’elle fut présentée au diable, dont elle baisa le derrière, car il n’y avait que les notables sorcières qui le baisassent au visage. Elle conta que le sabbat est une espèce de bal masqué où les uns se promènent en leur forme naturelle, tandis que d’autres sont transmués en chiens, en chats, en ânes, en pourceaux et autres bêtes ; qu’ils se rapetissent ou se grandissent à leur gré, par des moyens qu’elle ignore…Voy. Sabbat.

Belmonte, conseiller du parlement de Provence, qui eut au pied une petite plaie où la gangrène se mit ; le mal gagna vite, et il en mourut. Comme il avait poursuivi les sorciers prolestants et les perturbateurs réformés, les écrivains calvinistes virent dans sa mort prompte un châtiment et un prodige[1]. C’était au seizième siècle.

Bélomancie. Divination par le moyen des flèches. On prenait plusieurs flèches, sur lesquelles on écrivait des réponses relatives à ce qu’on voulait demander. On en mettait de favorables et de contraires; ensuite on mêlait les flèches, et on les tirait au hasard. Celle que le sort amenait était regardée comme l’organe de la volonté des dieux. — C’était surtout avant les expéditions militaires qu’on faisait usage de la bélomancie. Les Chaldéens avaient grande foi à cette divination.

Les Arabes devinent encore par trois flèches qu’ils enferment dans un sac. Ils écrivent sur l’une:Commandez-moi, Seigneur; sur l’autre : Seigneur, empêchez-moi, et n’écrivent rien sur la troisième. La première flèche qui sort du sac détermine la résolution sur laquelle on délibère. Voy. Flèches.

  1. Chassanion, Des grands et redoutables jugements de Dieu. Morges, 1581, p. 61.