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— VIII —

Ce qui peut-être n’a pas été remarqué suffisamment au milieu des clameurs intéressées des philosophes, c’est que les seuls hommes qui vivent exempts de superstitions sont les fidèles enfants de l’Église, parce qu’eux seuls possèdent la vérité. Les douteurs, au contraire, semblent tous justifier cette grande parole, que ceux qui se séparent de Dieu ont l’esprit fourvoyé ; car, parmi eux, les plus incrédules sont aussi les plus superstitieux. Ils repoussent les dogmes révélés, et ils croient aux revenants ; ils ont peur du nombre 13 ; ils ont un préjugé contre le vendredi ; ils recherchent l’explication des songes ; ils consultent les tireuses de cartes ; ils étudient l’avenir dans des combinaisons de chiffres ; ils redoutent les présages. On a cité un savant de nos jours qui poursuit l’élixir de vie ; un mathématicien célèbre qui croit les éléments peuplés par les essences cabalistiques ; un philosophe qui ne sait pas s’il croit à Dieu et qui exécute les cérémonies du grimoire pour faire venir le diable.

Ce livre donc reproduit les aspects les plus étranges des évolutions de l’esprit humain ; il expose tout ce qui concerne les esprits, lutins, fées, génies, démons, spectres et fantômes, les sorciers et leurs maléfices, les prestiges des charmeurs, la nomenclature et les fonctions des démons et des magiciens, les traditions superstitieuses, les récits de faits surnaturels, les contes, populaires. Il ouvre les cent portes fantastiques de l’avenir, par la définition claire des divinations, depuis la chiromancie des bohémiens jusqu’à l’art de prédire par le marc de café ou le jeu de cartes. L’astrologie, l’alchimie, la cabale, la phrénologie, le magnétisme, ont leur place en des notices qui résument par quelques pages de longs et lourds in-folio. Enfin, le spiritisme, les tables parlantes et les progrès du magnétisme se trouvent dans ces pages. Depuis quarante-cinq ans, l’auteur n’a cessé d’agrandir ce patient travail, en poursuivant ses recherches dans des milliers de volumes. Avant lui, personne n’avait songé à réunir en un seul corps d’ouvrage toutes les variétés que rassemble le Dictionnaire infernal ; et nul ne peut nier l’utilité de cette entreprise.

Les superstitions et les erreurs ont toujours pour fondement une vérité obscurcie, altérée ou trahie ; les éclairer, c’est les combattre. Si on les groupe, elles font saillie, et leurs difformités se révèlent. Ainsi, peu à peu, on produit la lumière dans ces pauvres intelligences qui refusent de s’élever jusqu’aux mystères sublimes de la foi, et qui s’abaissent à croire fermement les plus grossières impostures. On donne aussi des armes aux amis de la vérité, pour confondre les déceptions auxquelles se soumettent des esprits qui se croient supérieurs, parce qu’ils ne sentent pas leur faiblesse.

Par-dessus ces avantages, on a voulu satisfaire le goût de notre époque, qui exige des lectures piquantes, et, les sujets aidant, on a pu lui offrir très-fréquemment ces excentricités, ces singularités, cet imprévu et ces émotions dont il est si avide.

L’auteur de cette sixième édition, en la revoyant avec grand soin, l’a augmentée de 800 articles ; et l’éditeur l’a illustrée de 550 gravures, parmi lesquelles 72 portraits de démons, dessinés, d’après les documents de Wierus et des plus curieux démonographes, par M. L. Breton.