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spirent une ardeur qu’on a prise pour de l’amour. Telles sont les mouches cantharides avalées dans un breuvage. Un Lyonnais, voulant se faire aimer de sa femme qui le repoussait, lui fit avaler quatre de ces insectes pulvérisés dans un verre de vin du Rhône ; il s’attendait à un succès, il fut veuf le lendemain. À ces moyens violents on a donné le nom de philtres.

Rien n’est plus curieux, dit un contemporain, que la superstition qui en Écosse préside aux moyens ; employés pour faire naître l’amour ou vaincre la résistance de l’objet aimé. Sir John Colquhoun avait épousé depuis peu de mois lady Lilia Graham, fille aînée de Jean, quatrième comte de Montrose, lorsque lady Catherine, sa belle-sœur, vint passer quelque temps chez lui. Bientôt il en devint épris, et, pour vaincre l’indifférence qu’elle lui témoignait, il eut recours à un nécromancien habile, qui composa un bouquet formé de diamants, de rubis et de saphirs montés en or, et le doua de la propriété de livrer a la personne qui le donnait le corps et l’âme de celle qui le recevait. Il paraît que sir John fit un usage immédiat de ce talisman. Les chroniques de cette époque disent qu’il partit avec lady Catherine pour Londres près qu’il eut criminellement abandonné son épouse, et qu’il fut obligé d’y rester caché pour échapper à la sentence de mort qui avait été prononcée contre lui dans sa patrie.

Mais on comprend très-bien l’effet sur une femme mondaine et vaniteuse d’un philtre composé de riches diamants.

Phlégéton, fleuve d’enfer qui roulait des torrents de flamme et environnait de toutes parts la prison des méchants. On lui attribuait les qualités les plus nuisibles. Après un cours assez long en sens contraire du Cocyte, il se jetait comme lui dans l’Achéron.

Phooka, mauvais esprit qui paraît en Irlande sous la forme d’un poulain sauvage, chargé de chaînes pendantes, ou sous l’apparence d’une vache farouche, d’un oiseau de proie, d’un cheval maigre. Il parle ; et son plus grand plaisir est d’inquiéter les voyageurs égarés pendant la nuit.

Phosphore. Voy. Lampes perpétuelles, Stratagèmes, etc.

Phrénologie ou Crânologie, art ou science qui donne les moyens de juger les hommes par les protubérances du crâne. Voy. Gall.

Phylactères, préservatifs. Les Juifs portaient à leurs manches et à leur bonnet des bandes de parchemin, sur lesquelles étaient écrits des passages de la loi ; ce que Notre-Seigneur leur reproche dans saint. Matthieu, chap. xxiii. Leurs descendants suivent la même pratique et se persuadent que ces bandes ou phylactères sont des amulettes qui les préservent de tout danger, et surtout qui les gardent contre l’esprit malin.

Des chrétiens ont fait usage aussi de paroles écrites ou gravées comme de phylactères et préservatifs. L’Église a toujours condamné cet abus. Voy. Amulettes.

Phyllorhodomancie, divination par les feuilles de roses. Les Grecs faisaient claquer sur la main une feuille de rose et jugeaient par le son du succès de leurs vœux.

Physiognomonie, art de juger les hommes par les traits du visage, ou talent de connaître l’intérieur de l’homme par son extérieur.

Celle science a eu plus d’ennemis que de partisans ; elle ne paraît pourtant ridicule que quand on veut la pousser trop loin. Tous les visages, toutes les formes, tous les êtres créés diffèrent entre eux, non-seulement dans leurs classes, dans leurs genres, dans leurs espèces, mais aussi dans leur individualité. Pourquoi cette diversité de formes ne serait-elle pas la Conséquence de la diversité des caractères, ou pourquoi la diversité des caractères ne serait-elle pas liée, à cette diversité de forme ? Chaque passion, chaque sens, chaque qualité prend sa place dans le corps de tout être créé ; la colère enfle les muscles : les muselés enflés sont donc un signe de colère ?… Des yeux pleins de feu, un regard aussi prompt que l’éclair et un esprit vif et pénétrant se retrouvent cent fois ensemble. Un œil ouvert et serein se rencontre mille fois avec un cœur franc et honnête. Pourquoi ne pas chercher à connaître les hommes par leur physionomie ? On juge tous, les jours le ciel sur sa physionomie. On marchand apprécie ce qu’il achète par son extérieur, par sa physionomie… Tels sont les raisonnements des physionomistes pour prouver la sûreté de leur science. Il est vrai, ajoutent-ils, qu’on peut quelquefois s’y tromper ; mais une exception ne doit pas nuire aux règles.

J’ai vu, dit Lavater, un criminel condamné à la roue pour avoir assassiné son bienfaiteur, et ce monstre avait le visage ouvert et gracieux comme l’ange du Guide. Il ne serait pas impossible de trouver aux galères des têtes de Régulus et des physionomies de vestales dans une maison de force. Cependant le physionomiste habile distinguera les traits, souvent presque imperceptibles, qui annoncent le vice et la dégradation.

Quoi qu’il en soit de la physiognomonie, en voici les principes, tantôt raisonnables, tantôt forcés ; le lecteur saura choisir.

La beauté morale est ordinairement en harmonie avec la beauté physique. (Socrate et mille et mille autres prouvent le contraire.) Beaucoup de personnes gagnent à mesure qu’on apprend à les connaître, quoiqu’elles vous aient déplu au premier aspect. Il faut qu’il y ait entre elles et vous quelque point de dissonance, puisque, du premier abord, ce qui devait vous rapprocher ne vous a point frappé. Il faut aussi qu’il y ait entre vous quelque rapport secret, puisque plus vous vous voyez, plus vous vous convenez. Cepen-