Au commencement, dit Hésiode, était le Chaos, ensuite la Terre, le Tartare, l’Amour, le plus beau des dieux. Le Chaos engendra l’Érèbe et la Nuit, de l’union desquels naquirent le Jour et la Lumière. La Terre produisit alors les étoiles, les montagnes et la mer. Bientôt, unie au Ciel, elle enfanta l’Océan, Hypérion, Japhet, Rhéa, Phœbé, Thétis, Mnémosyne, Thémis et Saturne, ainsi que les cyclopes et les géants Briarée et Gygès, qui avaient cinquante têtes et cent bras. À mesure que ses enfants naissaient, le Ciel les enfermait dans le sein de la Terre. La Terre, irritée, fabriqua une faux qu’elle donna à Saturne. Celui-ci en frappa son père, et du sang qui sortit de cette blessure naquirent les géants et les furies. Saturne eut de Rhéa, son épouse et sa sœur, Vesta, Cérès, Junon, Pluton, Neptune et Jupiter. Ce dernier, sauvé de la dent de son père, qui mangeait ses enfants, fut élevé dans une caverne, et par la suite fit rendre à Saturne ses oncles qu’il tenait en prison, ses frères qu’il avait avalés, le chassa du ciel, et, la foudre à la main, devint le maître des dieux et des hommes.
Les Égyptiens faisaient naître l’homme et les animaux du limon échauffé par le Soleil. Les Phéniciens disaient que le Soleil, la Lune et les astres ayant, paru, le Limon, fils de l’Air et du Feu, enfanta tous les animaux ; que les premiers hommes habitaient la Phénicie ; qu’ils furent d’une grandeur démesurée et donnèrent leur nom aux montagnes du pays ; que bientôt ils adorèrent deux pierres, l’une consacrée au Vent, l’autre au Feu, et leur immolèrent des victimes. Mais le Soleil fut toujours le premier et le plus grand de leurs dieux.
Tous les peuples anciens faisaient ainsi remonter très-haut leur origine, et chaque nation se croyait la première sur la terre. Quelques nations modernes ont la même ambition : les Chinois se disent antérieurs au déluge de quelques centaines de mille ans. Ils croient la matière éternelle ; ils lui font produire un jour le dragon, la tortue, le dragon-cheval, des oiseaux singuliers, et un homme que les chroniques chinoises appellent Pan-kou ; quand il s’est tâté et reconnu dans le chaos, Pan-kou, qui n’est ni créé ni créateur, se fait un ciseau et un maillet avec quoi il débrouille