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» Les autres dieux passaient pour des divinités moyennes, célestes, terrestres, aquatiques et infernales, auxquelles on confiait le gouvernement de certaines parties de l’univers. Il y en avait d’autres que l’on ne reconnaissait que pour des dieux nouveaux qui avaient été ou engendrés des hommes et des dieux, ou déifiés par l’apothéose, à cause des bienfaits que l’on en avait reçus. Ces dieux s’appelaient indigetes, semidei. Tels étaient Hercule, Castor, Pollux, Esculape, et tous ceux que leurs mérites avaient élevés au ciel. Sur quoi Cicéron dit agréablement que le ciel est peuplé du genre humain. Il y en avait encore d’autres que l’on ne considérait que comme des dieux ou barbares et étrangers, ou incertains et inconnus, que l’on invoquait d’une manière douteuse, si tu es dieu, si tu es déesse, ou en général, sans les nommer, comme fait le bouffon comique de Plaute : Fassent, dit-il, tous les dieux grands ou petits, et les dieux des pots (Plaut., Cist., act. ii), etc. Ce sont ces divinités qu’Ovide appelle la populace des dieux, les Faunes, les Satyres, les Lares, les Nymphes.

» De tous ces dieux, il y en avait de bons et de mauvais, auxquels on sacrifiait afin qu’ils ne fissent point de mal (Aul. Gell., lib. v). Ces divinités hautes, moyennes et basses, n’étaient pas toutes également vénérées : on rendait à celles du premier ordre un culte suprême et universel, à celles du second un service subalterne. Que l’on adore, dit Cicéron, les dieux et ceux qui ont toujours été estimés célestes, et ceux que leurs mérites ont élevés au ciel (De leg., lib. ii). Mais pour les dieux inférieurs, étrangers, incertains et particuliers, on ne leur déférait qu’un honneur arbitraire, ou proportionné à leur faible pouvoir, qui ne s’étendait que sur certaines parties du monde, dont on leur avait donné le gouvernement.

» Je ne dirai rien de cette multitude de divinités païennes dont le nom seul est ridicule : tels étaient les dieux Vagitonus, Robigus, Picus, Tiberinus, Pilumnus, Consus ; telles étaient les déesses Cloacina, Educa, Potina, Volupia, Febris, Fessonia, Flora, etc. Je ne vous en rapporterai point mille histoires absurdes pour vous prouver que ce que l’on contait des dieux ne venait que des fictions des poètes, que le peuple, naturellement superstitieux, avait adoptées comme conformes à ses préjugés. »



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Nabam, démon que l’on conjure le samedi. Voy. Conjurations.

Nabérus, appelé aussi Nébiros, marquis du sombre empire, maréchal de camp et inspecteur général des armées. Il se montre sous la figure d’un corbeau ; sa voix est rauque ; il donne l’éloquence, l’amabilité et enseigne les arts libéraux. Il fait trouver la main de gloire ; il indique les qualités des métaux, des végétaux et de tous les animaux purs et impurs ; l’un des chefs des nécromanciens, il prédit l’avenir. Il commande à dix-neuf légions[1].

Nabuchodonosor, roi de Babylone, crut pouvoir exiger des peuples le culte et les hommages qui ne sont dus qu’à Dieu, et il fut pendant sept ans changé en bœuf. Les paradistes croient faire une grande plaisanterie en annonçant qu’on verra chez eux l’ongle de Nabuchodonosor[2] parmi d’autres bagatelles ; mais l’ongle de Nabuchodonosor est dans le cabinet de curiosités du roi de Danemark…

« Entre les Pères de l’Église, les uns, dit Chevreau, ont cru certaine la réprobation de Nebuchadnetzar, les autres n’ont douté nullement de son salut. On a fait encore des questions assez inutiles sur le texte de Daniel, où il est dit que « Nabuchodonosor fut banni sept ans de la compagnie des hommes ; qu’il demeurait avec les bêtes des champs ; qu’il mangeait l’herbe comme les bœufs ; que son poil devint long comme les plumes des aigles, et ses ongles comme ceux des oiseaux. » Saint Cyrille de Jérusalem, Cédrenus et d’autres ont été persuadés qu’il avait été changé en bœuf ; et notre Bodin y aurait souscrit, lui qui a cru à la lycanthropie. Je ne pousserai point cette question, et je me contente de dire ici, après beaucoup d’autres, qu’il perdit l’usage de la raison ; qu’il fut tellement changé par les injures de l’air, par la longueur de son poil et de ses ongles, et par sa manière de vivre avec les bêtes, qu’il s’imagina qu’il en était une. Tertullien dit qu’en cet état il fut frénétique ; saint Thomas, qu’il eut l’imagination blessée ; et les paroles de saint Jérôme sont remarquables : Quando autem dixit sensumsibi redditum, ostendit non formam se amisisse, sed mentem[3]. »

Nachtmaneken, ou petit homme de nuit, nom que les Flamands donnent aux incubes.

  1. Wierus, in Pseudomonarchia dæmonum.
  2. Et plus exactement Nebuchadnetzar, nom qui signifie Nebo le dieu prince, et Nebo serait le nom chaldéen de la planète de Mercure (M. Eugène Boré, De la Chaldée et des Chaldéens).
  3. Chevræana, t. I, p. 249.