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il faudrait le surprendre au moment où, se croyant seul, il est encore lui-même et n’a pas eu le temps de faire prendre à son visage l’expression qu’il sait lui donner. Découvrir l’hypocrisie est la chose la plus difficile et en même temps la plus aisée : difficile tant que l’hypocrite se croit observé, facile dès qu’il oublie qu’on l’observe. Cependant on voit tous les jours que la gravité et la timidité donnent à la physionomie la plus honnête un aperçu de malhonnêteté. Souvent c’est parce qu’il est timide, et non point parce qu’il est faux, que celui qui vous fait un récit ou une confidence n’ose vous regarder en face. N’attendez jamais une humeur douce et tranquille d’un homme qui s’agite sans cesse avec violence ; et en général ne craignez ni emportement ni excès de quelqu’un dont le maintien est toujours sage et posé.

Avec une démarche alerte, on ne peut guère être lent et paresseux ; et celui qui se traîne nonchalamment à pas comptés n’annonce pas cet esprit d’activité qui ne craint ni dangers ni obstacles pour arriver au but. Une bouche béante et fanée, une attitude insipide, les bras pendants et la main gauche tournée en dehors, sans qu’on en devine le motif, annoncent la stupidité naturelle, la nullité, le vide, une curiosité hébétée.

La démarche d’un sage est différente de celle d’un idiot, et un idiot est assis autrement qu’un homme sensé. L’attitude du sage annonce la méditation, le recueillement ou le repos. L’imbécile reste sur sa chaise sans savoir pourquoi ; il semble fixer quelque chose, et son regard ne porte sur rien ; son assiette est isolée comme lui-même. La prétention suppose un fond de sottise. Attendez-vous à rencontrer l’une et l’autre dans toute physionomie disproportionnée et grossière, qui affecte un air de solennité et d’autorité. Jamais l’homme sensé ne se donnera des airs, ni ne prendra l’attitude d’une tête éventée. Si son at-