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mort dans un combat, apparut autrefois tout armé à un prêtre nommé Étienne ou Stéphane, et le chargea de commissions qui devaient, en réparant quelques-unes de ses fautes, abréger son purgatoire. Cette histoire est rapportée par Pierre le Vénérable[1].

Guillaume, domestique de Mynheer Clatz, gentilhomme du duché de Juliers, au quinzième siècle. Ce Guillaume fut possédé du diable et demanda pour exorciste un pasteur hérétique nommé Bartholomée Panen, homme qui se faisait payer pour chasser le diable, et qui, dans cette circonstance, fut penaud. Comme le démoniaque pâlissait, que son gosier enflait et qu’on craignait qu’il ne fût suffoqué entièrement, l’épouse du seigneur Clatz, dame pieuse, ainsi que toute sa famille, se mit à réciter la prière de Judith. Guillaume alors se prit à vomir, entre autres débris, la ceinture d’un bouvier, des pierres, des pelotons de fil, du sel, des aiguilles, des lambeaux de l’habit d’un enfant, des plumes de paon que huit jours auparavant il avait arrachées de la queue du paon même. On lui demanda la cause de son mal. Il répondit que, passant sur un chemin, il avait rencontré une femme inconnue qui lui avait soufflé au visage, et que tout son mal datait de ce moment. Cependant, lorsqu’il fut rétabli, il nia le fait, et ajouta que le démon l’avait forcé à faire cet aveu, et que toutes ces matières n’étaient pas dans son corps ; mais qu’à mesure qu’il vomissait, le démon changeait ce qui sortait de sa bouche’[2]

Guillaume de Carpentras, astrologue qui fit, pour le roi René de Sicile et pour le duc de Milan, des sphères astrologiques sur lesquelles on tirait les horoscopes. Il en fit une pour le roi Charles VIII à qui elle coûta douze cents écus ; cette sphère, contenant plusieurs utilités, était fabriquée de telle manière que tous les mouvements des planètes, à toute heure de jour et de nuit, s’y pouvaient trouver ; il l’a, depuis, rédigée par écrit en tables astrologiques[3].

Guillaume le Roux, fils de Guillaume le Conquérant, et tyran de l’Angleterre dans le onzième siècle. C’était un prince abominable, sans foi, sans mœurs, blasphémateur et cruel. Il fit beaucoup de mal à l’Église, chassa l’archevêque de Cantorbéry et ne voulut point que ce siège fût rempli de son vivant, afin de profiter des revenus qui y étaient attachés. Il laissa les prêtres dans la misère et condamna les moines à la dernière pauvreté. Il entreprit des guerres injustes et se fit généralement détester. Un jour qu’il était à la chasse (en l’année 1100, dans la quarante-quatrième de son âge et la treizième de son règne), il fut tué d’une flèche lancée par une main invisible. Pendant qu’il rendait le dernier soupir, le comte de Cornouailles, qui s’était un peu écarté de la chasse, vit un grand bouc noir et velu, qui emportait un homme défiguré et percé d’un trait de part en part… Le comte, troublé de ce spectacle, cria pourtant au bouc de s’arrêter, et lui demanda qui il était, qui il portait, où il allait ? Le bouc répondit : — « Je suis le diable ; j’emporte Guillaume le Roux, et je vais le présenter au tribunal de Dieu, où il sera condamné pour sa tyrannie ; et il viendra avec nous[4] . »

Guillaume de Paris. Il est cité par les démonographes pour avoir fait des statues pariantes, à l’exemple de Roger Bacon, chose qui ne peut avoir lieu que par les opérations diaboliques[5]. Naudé a réfuté cette imputation.

Guillaume III, comte de la comté de Bourgogne. C’était un bandit sans vergogne et un bourreau sans pitié. Un jour que, chargé de crimes et de sacrilèges, il était en orgie, un inconnu le fit demander pour lui offrir un beau cheval. Dès qu’il l’eut monté, il fut emporté et disparut. L’inconnu était le diable qui venait prendre son bien[6].

Guillemin, esprit familier de Michel Verdung, avec l’aide duquel il pouvait courir aussi vite qu’il le voulait.

Guinefort. C’est le nom d’un chien que les fabliaux du moyen âge ont illustré. Ce chien, ayant sauvé un enfant qu’un serpent voulait dévorer, fut tué par son maître, qui, lui voyant la gueule ensanglantée, crut qu’il avait étranglé son enfant ; suivant une autre version, il périt dans le combat avec le serpent. Le maître éclairé lui fit un petit tombeau ; ce qui était imprudent ; car, dans la suite, des paysans trompés prirent ce tombeau pour celui d’un saint et invoquèrent saint Guinefort. Le P. Bourbon, dans une mission qu’il fit au pays de Lyon et en Auvergne, fit tomber cette superstition, qui certainement n’était qu’une suggestion du diable. Ce chien, appelé Guinefort dans le Lyonnais, s’appelait Ganelon en Auvergne[7].

Guivre, monstre qu’on ne trouve que dans les bestiaires du moyen âge et que les artistes ont reproduit. M. Paulin Paris a établi qu’il ne faut pas confondre la Guivre avec la Vouivre ; la Guivre n’est qu’un griffon ou une hydre que l’on voit figurer sur quelques vieux monuments.

Gullets ou Bonasses, démons qui servent les hommes dans la Norvège, et qui se louent

  1. Voyez-la dans les Légendes de l’autre monde : Légendes du purgatoire.
  2. Wierus, De prœst., lib. III, cap. vi.
  3. Extrait d’un ancien manuscrit, cité à la fin des Remarques de Joly sur Bayle.
  4. Matthœi Tympii prœmia virtutum. — Matthieu Paris, Historia major, t. IL
  5. Naudé, Apologie pour les grands personnages accusés de magie, ch. xvii, p. 493.
  6. Voyez sa légende dans les Légendes infernales.
  7. Voyez les Fabliaux du moyen âge, recueillis par J. Loyseau, 1846, p. 26.