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la coutume de faire des esclaves. Il avait reçu du ciel, avec le don de science et de sagesse, trente volumes remplis des connaissances les plus abstraites ; lui-même en composa beaucoup d’autres, aussi peu connus que les premiers. Dieu l’envoya aux Caïnites pour les ramener dans la bonne voie. Mais ceux-ci ayant refusé de l’écouter, il leur fit la guerre et réduisit leurs femmes et leurs enfants en esclavage. Les Orientaux lui attribuent l’invention de la couture et de l’écriture[1], de l’astronomie, de l’arithmétique, et encore plus particulièrement de la géomancie. On dit de plus qu’il fut la cause innocente de l’idolâtrie. Un de ses amis, affligé de son enlèvement, forma de lui, par l’instigation du démon, une représentation si vivement exprimée, qu’il s’entretenait des jours entiers avec elle, et lui rendait des hommages particuliers, qui peu à peu dégénérèrent en superstition. Voy. Hénoch.

Effrontés, hérétiques qui parurent dans la première moitié du seizième siècle. Ils niaient le Saint-Esprit, pratiquaient diverses superstitions, rejetaient le baptême et le remplaçaient par une cérémonie qui consistait à se racler le front avec un clou jusqu’à effusion de sang, puis à le panser avec de l’huile. C’est cette marque qui leur restait au front qui leur a fait donner leur nom d’effrontés.

Égérie, nymphe qui seconda Numa Pompilius dans son projet de civiliser les Romains. Les démonomanes en ont fait un démon succube, et les cabalistes un esprit élémentaire, une ondine selon les uns, une salamandre selon les autres, qui la disent fille de Vesta. Voy. Zoroastre et Numa.

Égipans, démons que les païens disaient habiter les bois et les montagnes, et qu’ils représentaient comme de petits hommes velus, avec des cornes et des pieds de chèvre. Les anciens parlent de certains monstres de Libye, auxquels on donnait le même nom ; ils avaient un museau de chèvre avec une queue de poisson : c’est ainsi qu’on représente le capricorne. On trouve cette même figure dans plusieurs monuments égyptiens et romains.

Égithe, sorte d’épervier boiteux, dont une idée bizarre avait répandu l’opinion chez les anciens que sa rencontre était du plus heureux présage pour les nouveaux mariés.

Église (l’) et les Sorciers. Les pauvres êtres accusés de sorcellerie n’ont jamais été traités par l’Église avec les cruautés des juges laïques. Voy. l’article Sorciers, à la fin.

Élaïs, une des filles d’Anios, d’Élée, magicienne qui changeait en huile tout ce qu’elle touchait.

Élasticité. Il y a des pierres élastiques et des grès flexibles. Une poutre en marbre, qui fait l’étonnement des curieux à la cathédrale de Lincoin, est élastique[2]. De telles raretés ont passé autrefois pour œuvres de féerie.

Éléazar, magicien, Juif de nation, qui attachait au nez des possédés un anneau où était enchâssée une racine dont Salomon se servait, et que l’on présume être la squille[3]. À peine le démon l’avait-ii flairée qu’il jetait le possédé par terre et l’abandonnait. Le magicien récitait ensuite des paroles que Salomon avait laissées par écrit ; et, au nom de ce prince, il défendait au démon de revenir dans le même corps ; après quoi il remplissait une cruche d’eau et commandait audit démon de la renverser. L’esprit malin obéissait ; ce signe était la preuve qu’il avait quitté son gîte.

Éléazar de Garniza, auteur hébreu qui a laissé divers ouvrages dont plusieurs ont été imprimés et d’autres sont restés manuscrits. On distingue de lui un Traité de l’âme, cité par Pic de la Mirandole dans son livre contre les astrologues, et un Commentaire cabalistique sur le Pentateuque.

Éléments. Les éléments sont peuplés de substances spirituelles, selon les cabalistes. Le feu est la demeure des salamandres ; l’air, celle des sylphes ; les eaux, celle des ondins ou nymphes, et la terre, celle des gnomes. Il est certain que les éléments, l’air surtout, sont abondamment peuplés de démons et d’esprits, et que les puissances de l’air ne le laissent pas vide.

Éléphant. On a dit des choses merveilleuses de l’éléphant. On lit encore dans de vieux livres qu’il n’a pas de jointures, et que, par cette raison, il est obligé de dormir debout, appuyé contre un arbre ou contre un mur ; que s’il tombe, il ne peut se relever. Cette erreur a été accréditée par Diodore de Sicile, par Strabon et par d’autres écrivains. Pline conte aussi que l’éléphant prend la fuite lorsqu’il entend un cochon : et, en effet, on a vu en 1769 qu’un cochon ayant été introduit dans la ménagerie de Versailles, son grognement causa une agitation si violente à un éléphant qui s’y trouvait qu’il eût rompu ses barreaux si l’on n’eût retiré aussitôt l’animal immonde. Mien assure qu’on a vu un éléphant qui avait écrit des sentences entières avec sa trompe, et même qui avait parlé. Christophe Acosta assure la même chose[4]. Dion Cassius prête à cet animal des sentiments religieux. Le matin, dit-il, il salue le soleil de sa trompe ; le soir il s’agenouille ; et quand la nouvelle lune paraît sur l’horizon, il rassemble des fleurs pour lui en composer un bouquet. On sait que les éléphants ont beaucoup de goût pour la musique ; Arrien rapporte qu’il y en a eu un qui faisait danser ses camarades au son des cymbales. On

  1. Voyez Cadmus.
  2. Monthly Magazine, oct. 1825, p. 224.
  3. 2 Bodin, Démonomanie, liv. I, ch. iii, p. 88.
  4. Thomas Brown, Essai sur les erreurs populaires, liv. III, ch. {{rom|i, p. 241.