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Quant à Bonaparte, pourquoi eût-il hésité ? Rien ne l’attachait aux Bourbons ni à la monarchie. Aussi bien que la Révolution, il eût servi le grand Turc, chose à laquelle, dans une heure de détresse, il pensera un peu plus tard. Et, sur le moment, il ne s’aperçut pas que l’émigration, en dépeuplant les cadres, lui donnait des chances d’avancer comme les événements apportaient aux militaires des chances de se signaler.

Pour qu’il fît une carrière en France, pour que son adhésion au régime nouveau lui profitât, il fallait qu’il se déprît enfin de cette Corse, de cette ensorceleuse à laquelle il revenait avec obstination. Pour son bonheur, celle qui l’avait séduit se chargera de le repousser. Il y a ainsi des hommes qui, avec leur liberté, doivent leur fortune à une déception de jeunesse et à un bienfaisant chagrin d’amour.