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LE REDRESSEMENT DE WAGRAM

attribuée à quelqu’un, et, après tout, il n’eût tenu qu’aux Russes de l’occuper tout entière au lieu de n’entrer que sur la frange, de ménager les Autrichiens et d’y laisser paraître Poniatowski tandis que les Galiciens prenaient parti pour Napoléon. Sans sa défection, le tsar serait en tiers dans les pourparlers de paix. Il pourrait y entrer encore, et pourtant il se dérobe, comme s’il ne voulait prendre aucune part à un démembrement de l’Autriche et garder le droit de se plaindre de la France. Alors Napoléon tente un jugement de Salomon. Une portion de la Galicie grossira le duché de Varsovie ; une autre, « plus qu’ils n’ont gagné », ira aux Russes, le principal restant à l’Autriche. À Saint-Pétersbourg, il fait redire avec précision, redire avec insistance, que « l’idée de la renaissance de la Pologne » n’est nullement celle de l’empereur, qui « approuve que les mots de Pologne et de Polonais disparaissent non seulement de toutes les transactions politiques, mais même de l’histoire ». Cependant, si petit soit-il, un agrandissement du duché de Varsovie inquiète les Russes, leur sert de grief contre l’alliance française. « Fantôme d’alliance », mais que Napoléon tient à conserver. « Par cela même que l’empereur ne croit plus à l’alliance de la Russie, il lui importe davantage que cette croyance, dont il est désabusé, soit partagée par toute l’Europe. »

Garder cette effigie, ce simulacre, cette peinture, c’est utile non seulement pour tenir l’Europe en respect, mais pour obtenir un autre « point d’appui », puisque l’expérience vient de prouver que la Russie ne répond pas quand on a besoin d’elle. L’idée qu’il a jetée en passant pendant les négociations de la paix de Vienne, Napoléon y revient, et, cette idée, Metternich, tenté par l’exemple d’Alexandre, la flatte. Son Tilsit, pourquoi l’Autriche ne l’aurait-elle pas ? À attaquer la France, elle n’a rien gagné qu’une invasion et des pertes de territoire. Il est imprudent de se draper dans l’honneur et dans