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NAPOLÉON

ments de l’Ouest. Il tient à ne pas manquer la visite qu’il leur a promise, à connaître « l’esprit du peuple de la Vendée », s’en dit à plusieurs reprises « extrêmement satisfait » parce qu’il a craint, sans doute, que le soulèvement de l’Espagne, cette Vendée agrandie, et le conflit avec le Saint-Siège n’eussent là du retentissement.

Toute petite chose, minime satisfaction. Ses inquiétudes vont bien plus loin. Si l’affaire de Bayonne avait réussi, l’abdication forcée des Bourbons d’Espagne passerait comme l’exécution du duc d’Enghien a passé. Mais l’armée française bat en retraite, Joseph a évacué Madrid où Ferdinand VII est proclamé seul et vrai roi de la nation espagnole. Alors, pour l’Europe, Bayonne n’est plus qu’un guet-apens, un attentat dont on rapproche, par une indignation qui retarde, le rapt d’Ettenheim et le drame de Vincennes. Telle est la justice du monde. Napoléon en raisonnera très bien à Sainte-Hélène : « Le tout demeure fort vilain puisque j’ai succombé. » Son premier échec détermine un accès de vertu. Dans une Europe qui en a vu, fait, accepté bien d’autres — à commencer par les partages de la Pologne — on se met à parler avec pudibonderie des violences de Napoléon. Après Vincennes, la cour de Vienne avait fait savoir qu’elle comprenait les nécessités de la politique. Après l’entrée du général Miollis à Rome, elle avait répondu à la protestation du pape que sa lettre circulaire n’était bonne qu’à lui attirer « de nouveaux désagréments ». Depuis que les affaires d’Espagne se gâtent, l’Autriche arme, bien pourvue d’argent anglais, et prétend qu’il n’y a plus de sécurité pour aucun trône après l’abdication trop bien provoquée de Charles IV. Ces armements, la guerre qu’ils annoncent, Napoléon veut en avoir le cœur net. Dès le lendemain de son retour à Paris, le 15 août, jour de sa fête, à l’audience du corps diplomatique, grande scène à Metternich, mais point d’orage, une