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NAPOLÉON

pui et la bénédiction, s’est‑il laissé entraîner contre le pontife à des violences qui détruisaient l’effet moral du sacre ? La cause ne change pas. Souverain temporel, Pie VII refusait de rompre avec l’Angleterre, invoquant les intérêts spirituels dont il avait la charge. L’empereur s’adressait au chef des États pontificaux, le sommait de prendre les mesures commandées par le blocus continental, lui représentait que Rome ne pouvait rester, entre le royaume d’Italie et le royaume de Naples, comme une enclave ouverte aux Anglais. Pie VII répondait que, père de tous les fidèles, toutes les nations étaient égales pour lui, et que, pour protéger les intérêts catholiques, où qu’ils fussent, il avait le devoir de rester en communication avec les gouvernements. La politique de l’empereur exigeait. Le devoir du pape aussi. La querelle, qui était sans issue, durait depuis longtemps. Toutefois, comme pour l’Espagne, c’est seulement après Tilsit, qui semblait lui permettre tout, que Napoléon s’occupa de l’affaire romaine avec la volonté d’en finir et de ne plus souffrir au blocus cette autre fissure pour que le blocus fût efficace. Mis en demeure d’entrer dans la confédération italienne et de faire cause commune avec elle et avec la France, Pie VII refuse encore de prendre une attitude qui l’eût rendu belligérant. Une partie de ses États était déjà occupée par les troupes françaises. Le 2 février 1808, l’empereur exécute sa menace. Le général Miollis prend possession de Rome.

Ici, il ne faut rien exagérer ni croire qu’un cri de réprobation s’éleva en Europe. Le scandale de la profanation fut peut‑être encore moins grave qu’il ne devait l’être, soixante‑deux ans plus tard, quand le nouveau royaume d’Italie s’emparerait à son tour de la cité pontificale. Les démêlés du Saint‑Siège avec les gouvernements n’étaient pas nouveaux. Napoléon rappelait avec complaisance que saint Louis n’avait rien cédé sur