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CHAPITRE XV

L'ÉPÉE DE FRÉDÉRIC


Napoléon ayant levé le camp de Boulogne pour répondre à la diversion austro-russe, il eût été naturel qu’il revînt à Boulogne une fois l’Autriche et la Russie hors de combat. Naturel si Trafalgar n’eût été qu’une contrariété. La destruction de la principale force navale de la France ne permettait plus de passer la Manche. Y renoncer, c’était avouer que la guerre navale était perdue sans recours. L’avenir fut réservé par une annonce vague : « L’empereur va reporter son attention sur sa marine, sur sa flottille et prendre toutes les mesures pour réduire l’Angleterre, si elle ne fait pas la paix. » Cette note est du 6 février 1806. Elle sera sans lendemain. Jamais Napoléon n’aura le loisir de relever sa marine du désastre de Trafalgar. Pourtant la paix est toujours son plus grand intérêt, son plus grand besoin parce qu’elle mettrait sa monarchie à l'abri des hasards. Cette paix, que la France attend toujours, qu’elle croit acquise après Austerlitz comme elle le croyait après Marengo, comment y contraindre l’Angleterre encore plus inaccessible dans son île depuis qu’elle règne sans partage sur l’Océan ? Or voici que se lève un espoir.

Napoléon rentre à Paris pour y apprendre la mort de Pitt. Joyeuse nouvelle. Le plus grand ennemi de la France, disparaît. Pitt et Cobourg, les patriotes de la République ont si longtemps réuni ces deux noms dans une même haine, personnifiant