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LE BOURSIER DU ROI 23 déjà un corps de combattants scientifiques chez les Romains.

À la veille de la Révolution, l’artillerie française, de l’avis général, était la meilleure de l’Europe. Sous la direction de Gribeauval, elle avait encore accompli des progrès. Napoléon aurait d’excellents maîtres pour apprendre le métier d’artilleur. Il ne faut pas oublier plus qu’il ne l’avait oublié lui-même qu’en somme il sortait de l’armée royale et qu’il lui devait ce qu’il savait. C’était le maréchal de Ségur, ministre de la Guerre, qui, le 22 octobre 1784, avait signé son brevet de cadet-gentilhomme. Seize ans plus tard, le premier Consul donnait une pension au vieux soldat de la monarchie, et, le recevant aux Tuileries, lui faisait rendre les honneurs par la garde consulaire. C’était comme un salut à la vieille armée.

De l’école où entrait le nouveau cadet-gentilhomme, on avait, sous Louis XV, voulu faire un établissement modèle. Les bâtiments eux-mêmes, dessinés par Gabriel, sont encore parmi les plus beaux de Paris. Tout y avait grand air, et Bonaparte, au sortir d’un collège de province qui l’avait peu changé de la simplicité corse, s’étonna de cette magnificence. On dit même qu’il trouvait la dépense excessive. Il est vrai qu’habitué de bonne heure à compter il restera toujours économe. Mais cette École militaire où l’on faisait trop bien les choses lui donna peut-être pour la première fois l’impression que la France était un très grand pays

Là il eut encore pour camarades des jeunes gens de bonne famille dont quelques-uns s’appelaient Montmorency-Laval, Fleury, Juigné, celui-ci neveu de cet archevêque de Paris qui, surpris par le prénom du cadet Bonaparte et lui disant qu’il ne trouvait pas de Napoléon inscrit au calendrier, s’entendait répondre : « Il n’y a que trois cent soixante-cinq jours dans l’année et tant de saints ! ». Pour la plupart, les jeunes gens qui étaient alors à l’Ecole royale militaire de Paris émigreront. Beaucoup refu-