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NAPOLÉON

La Constitution de l’an VIII fut promulguée le 14 décembre 1799, un peu plus d’un mois après la journée de Saint-Cloud. Les trois Consuls entrèrent en fonction le 25 décembre. Les cinquante commissaires les installèrent et, avec eux, c’était la Convention, continuée par les Assemblées du Directoire, qui transmettait officiellement et solennellement le pouvoir au général Bonaparte et à ses deux collègues. Il y avait transition, non rupture. Et la proclamation qui fut lancée aux Français pour annoncer que les Consuls définitifs succédaient aux Consuls provisoires était sincère lorsqu’elle disait : « Citoyens, la Révolution est fixée aux principes qui l’ont commencée ». En ajoutant : « Elle est finie », on s’abandonnait seulement à une illusion générale et qui n’était même pas neuve. Combien de fois n’avait‑on pas dit qu’elle avait atteint son terme ? Louis XVI lui-même l’avait cru quand le président de la Constituante le lui avait dit.

Pour qu’elle prît fin, comme on le voulait alors, il fallait la paix, mais la paix avec les frontières naturelles. Et ce désir de paix, c’était une des causes du 18 brumaire, comme c’était une des raisons de la popularité de Bonaparte. Chose qu’on se représente mal aujourd’hui, Bonaparte, dans la rue, était acclamé au cri de : « Vive la paix ! » L’auteur du traité de Campo-Formio donnerait enfin ce qu’on attendait, ce qu’on espérait depuis si longtemps. Car la guerre durait toujours, et c’est un élément de la situation qu’il faut garder présent à l’esprit pour comprendre la suite des choses. Bien que chef d’un gouvernement civil, le premier Consul serait encore chef de guerre.

La France, en 1800, se flattait que ce ne serait plus pour longtemps. Un dernier effort et l’on aurait le repos. D’instinct on se disait aussi que ce dernier effort voulait un gouvernement vigoureux, qu’on ne remportait pas de victoires décisives avec la haine, les proscriptions, la guerre civile à l’intérieur, qu’il