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LOUIS II DE BAVIÈRE



Il est peu de figures qui prêtent davantage à la légende et au roman que celle du malheureux roi de Bavière. À ne prendre que la France, il serait difficile de compter ce que lui doit la littérature. Il y a eu sur lui, à propos de lui ou autour de lui, des romans lyriques et des romans ironiques. Il y a eu le Roi Vierge, il y a eu le Roi Fou, et Jules Lemaître a pensé à la tragédie de Starnberg en écrivant ses Rois.

Une idéale apparition au milieu d’un siècle de fer, un martyr de l’art, un martyr de la foi, Louis II n’est pas moins que tout cela en quatorze vers d’un sonnet de Verlaine.

La Norvège aussi s’est intéressée à Louis II et elle n’a pas découvert chez lui moins de merveilles. Biôrnstierne Biôrnson a fait l’aveu qu’il avait longtemps rêvé d’écrire une pièce sur le roi de Bavière, d’être le Shakespeare de cet Hamlet.

M. Gabriel d’Annunzio devait écrire encore dans ses Vierges aux Rochers : « Ce Wittelsbach m’attire par l’immensité de son orgueil et de sa tristesse… Louis de Bavière est vraiment un roi, mais roi de lui-même et de son rêve. » Hélas ! roi de lui-même n’est qu’un mot, un mot lyrique. Et la vérité nous oblige à dire qu’on ne trouve rien de pareil, à l’analyse, dans la vie sans direction, dans les songeries à la dérive, du malheureux héritier des Wittelsbach.

Cette débauche de littérature aura certainement valu aux châteaux du roi de Bavière la visite de plus d’un voyageur séduit. Et la mémoire de Louis II n’aura pas à se plaindre : ce furent souvent des voyageurs de marque. Maurice Barrès, par exemple, se donna la peine de faire chez Louis II une promenade idéologique. Seulement Maurice Barrès, ayant vu, vit tout de suite juste. Il trouva bien médiocre la sensibilité du roi de Bavière. Il se détourna vite des « fumées de son imagination ». Avec une