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Crailsheim voulant, dix ans plus tard, passer l’été à Schwangau, fut mis en quarantaine et ne trouva personne qui consentît à lui louer sa maison, en punition de la part qu’il avait prise au drame de 1886…

Au château de Berg, Louis II retrouvait les souvenirs de son enfance et de sa jeunesse. C’est là qu’il avait reçu Wagner, qu’il avait passé ses plus beaux jours d’enthousiasme au temps de son amitié avec « l’Unique ». Berg n’avait pas changé, était toujours encombré de cygnes et de peintures wagnériennes, de copies de bibelots et de tableaux français. Mais les aliénistes en avaient fait en un tour de main une maison de santé savamment organisée avec des guichets aux portes qui permettraient de tenir, jour et nuit, l’auguste malade sous la surveillance de ses gardiens. Louis II s’impatienta de ces mesures, comme de tout ce qui lui signifiait sa nouvelle condition de malade et d’enfermé. Mais pour la troisième fois il s’apaisa, accepta d’être épié, comme il acceptait les figures nouvelles des infirmiers qui remplaceraient désormais son valet de chambre et son coiffeur ordinaires. Ce ne fut sans doute pas le sacrifice qui lui coûta le moins, car l’horreur des visages nouveaux était devenu chez lui une manie. Sa volonté était tellement tendue qu’il réussit, pendant quelques jours, à triompher de toutes ses impressions.

Avait-il, dès les premières heures de sa captivité, conçu un projet d’évasion ? Avait-il reçu du dehors des avis secrets ? Savait-il qu’on travaillait à sa délivrance ? Le mystère ne s’est pas encore levé sur cette partie du drame, mais il est infiniment probable qu’en effet Louis II mit à exécution un plan qui lui avait été suggéré de l’extérieur.

Nous avons eu l’occasion de voir que le roi était porté à l’ironie, d’un naturel quelquefois assez moqueur, malgré ses dons de rêverie et d’enthousiasme. Dans la partie de finesse