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quelque motif d’intervenir comme un dieu de théâtre. » Et pour finir : « Le monde peut bien être deux fois pris au même lacet. »

C’est ce qui arriva. Exilé en Angleterre après la mort d’Hortense, Louis-Napoléon publia d’abord en 1839 ses Idées napoléoniennes, où il parle du fondateur de sa dynastie comme d’un dieu. Il y résumait l’essentiel de ses idées : la paix en Europe par la délimitation des groupes ethniques, la conciliation de la liberté et de l’autorité, la distribution des terres incultes, l’accès de la classe ouvrière à la propriété, le libre échange. C’était le moment où le prince de Joinville ramenait en France les cendres de Napoléon. L’occasion, cette fois, était-elle bonne ? Il débarqua à Boulogne, un aigle déplumé sur l’épaule, et fut arrêté plus vite encore qu’à Strasbourg. Il allait sombrer sous le ridicule : une condamnation sévère l’en sauva.

Dans le fort de Ham où on l’enferma, le prétendant bonapartiste travailla. Il écrivit sur l’extinction du paupérisme, sur le canal de Nicaragua, sur l’électricité, sur le sucre de betterave, sur l’artillerie. Pendant six ans, il eut le temps de monter maints projets. En 1846, il apprit que son père se mourait, et prépara son évasion, qui réussit d’une manière assez simple : il sortit du fort de Ham sous la blouse que lui avait