Page:Jacquemont - Correspondance inédite de Victor Jacquemont avec sa famille et ses amis, tome 1.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

V


à m. henri beyle[1], à paris.


Paris, 28 mai 1825, à midi et demi.


Je lisais hier votre manuscrit[2] quand un de mes amis entra chez moi, me rapportant Racine et Shakspeare[3] que je lui avais prêté il y a quinze jours ; il l’a gardé tout ce temps, l’ayant fait lire à d’autres et l’ayant lu lui-même trois fois pour sa part, avec un plaisir extrême.

Cet ami est un jeune homme de mon âge qui est sorti, il y a quelques années, le premier de l’École polytechnique ; il a beaucoup d’esprit, une sensibilité qui n’a pas été desséchée par l’étude. Il a au plus haut degré le sentiment des beaux-arts, et point du tout de littérature ; car, jusqu’ici, il n’a pas eu le temps de lire. Tout son loisir, depuis deux ans, il l’a employé aux choses de son métier (il est officier d’artillerie), afin de devenir très-promptement le plus habile de son corps, et de n’avoir plus ensuite à s’en occuper. Il n’avait jamais réfléchi aux systèmes littéraires. Votre pamphlet me l’a ramené complètement romantique.

  1. De Stendhal.
  2. De l’ouvrage de Stendhal intitulé De l’Amour.
  3. Brochure littéraire de Beyle.