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« Cette méthode d’incubation artificielle existe depuis plusieurs milliers d’années en Égypte ; elle était autrefois entre les mains des prêtres, qui très-probablement l’inventèrent. Ceux qui la pratiquent aujourd’hui sont de pauvres diables de paysans qu’on appelle Berméens, du nom d’un village voisin du Caire. Les Berméens ne sont en quelque sorte que les employés de propriétaires du pays avec lesquels ils partagent par moitié les bénéfices, qui consistent dans le tiers, ou un peu moins, des œufs qu’on leur donne à couver. Il y a ordinairement un mamal pour quinze ou vingt villages. Les habitants apportent leurs œufs, reçoivent un bon en échange, et reviennent au bout de vingt-deux jours prendre autant de fois deux poussins qu’ils ont donné trois œufs.

« Ces poussins, qui demandent les plus grands soins, surtout pendant les deux ou trois premières semaines, sont ordinairement élevés par des femmes. Elles en ont souvent trois ou quatre cents à la fois, et elles les tiennent le plus chaudement et le plus sèchement qu’elles peuvent, les mettant sur les terrasses qui couvrent leurs maisons, et les abritant pendant la nuit.

« La quantité de poulets produite annuellement par les mamals était d’une centaine de millions dans l’ancienne Égypte, et on la porte encore aujourd’hui à une trentaine de millions.

« On a essayé, à différentes époques, d’introduire en Europe le procédé égyptien : d’abord, dans l’antiquité, chez les Grecs et chez les Romains ; puis, au moyen âge, à Malte, en Sicile et en Italie ; et enfin en France, où deux rois s’occupèrent de faire construire des fours, Charles VII à Amboise et François Ier à Montrichard. Sous les règnes suivants, on tenta encore des essais dont Olivier de Serres nous entretient. À une époque beaucoup plus récente, de nombreuses expériences furent faites par plusieurs savants : on connaît les essais de Réaumur, et ses couches de fumier renouvelées des Indiens et des Chinois ; après lui vinrent les tentatives de l’abbé Copineau, de Dubois, de Bonnemain et de plusieurs autres dont il serait intéressant,