Page:Jacque - Le Poulailler, 1878.djvu/276

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

mais ce qu’on ne remarque pas sans étonnement, ce sont les changements de couleur qui s’opèrent successivement dans son pelage avant qu’il soit arrivé à les perdre toutes. Ainsi, lorsqu’on fait couvrir une femelle par un mâle de la même portée, les petits sont ou gris maculés de blanc, ou, plus fréquemment encore, d’un roux pâle avec ou sans maculature ; si l’on accouple deux individus provenant de cette union, l’on obtient des lapins noirs ou noirs et blancs ; l’expérience poursuivie, la quatrième génération offre des sujets d’un gris ardoisé bleuâtre, résultant du mélange de poils noirs et de poils blancs ; si, enfin, l’on réunit encore deux élèves de cette dernière portée, il est à peu près certain qu’il naîtra des albinos parfaits, c’est-à-dire entièrement blancs avec les yeux roux.

« La singularité du passage au blanc par l’intermédiaire du noir est un phénomène bien digne de remarque et qui se présente d’une manière peut-être plus curieuse chez notre mouton. Lorsque, par négligence ou économie mal entendue, les béliers d’un troupeau, n’ayant pas été changés, ont servi à la saillie de brebis issues d’eux-mêmes, ou qu’un jeune mâle, conservé intentionnellement, a dû couvrir ses sœurs, il naît souvent de ces alliances des agneaux d’un brun noir. Nous voyons ici le noir servir de passage du blanc naturel au blanc albin, car, tout en paraissant en contradiction avec moi-même, je ne puis voir dans nos belles races de moutons que des variétés fixées de l’espèce primitive et que je pense être le mouflon d’Europe.

« La dégradation albine n’est pas renfermée dans le cercle de nos éducations particulières ; elle se rencontre également dans la nature, où, sans être fréquente, elle n’est cependant pas très-rare. À ce sujet, je crois avoir remarqué qu’elle affecte principalement les oiseaux et surtout les espèces qui se cantonnent et quittent peu les lieux qui les ont vus naître : les perdrix dans nos champs cultivés, les choucas qui établissent leurs habitations dans les clochers des églises, et les moineaux dans les villes et villages qu’ils abandonnent peu. En