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n’est pas d’exemple de femmes ayant fléchi devant le magistrat. Toutes, au contraire, se sont présentées avec l’idée conçue d’avance de braver l’étranger qui avait l’audace de s’occuper de leurs affaires religieuses. Le plus souvent, quand une veuve est décidée à se sacrifier, on se passe de l’autorisation du juge ; il n’apprend la chose que lorsqu’elle est consommée, et comme il n’est armé de ce fait d’aucune sanction pénale, il ne s’inquiète pas autrement de l’affaire.

Si d’aventure quelque lecteur se demandait pourquoi l’Angleterre n’a pas aboli définitivement ces sacrifices humains, je lui répondrais que l’Angleterre est venue récolter dans l’Inde les fruits du travail de deux cent cinquante millions d’Indous, et que la question d’humanité passe après celle du ballot de coton. Or, toucher à une idée religieuse dans l’Inde est le seul cas qui puisse soulever une révolte. Que les femmes indoues se brûlent donc si elles le désirent, mais que l’honnête trafic de l’honnête John Bull ne soit pas troublé.

Si les suttys ont diminué, ainsi que je viens de le dire, cela tient à une autre cause, puisqu’ils ne sont pas prohibés, et cette cause, la voici : Les Européens qui habitent l’Inde, et à leur tête les Indianistes, qui, par la nature de leurs études, vivent plus familièrement que leurs