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voyage au pays des brahmes.

capitaine et moi, dans une de ces demi-somnolences qui jettent l’esprit dans le rêve, sans lui enlever cependant la faculté de diriger ses pensées… Tout à coup, un cri déchirant se fait entendre à deux pas de nous.

Ayo Sami ! (oh ! mon Dieu !)

Avant que nous ayons eu le temps de nous rendre compte de ce qui se passait, un rugissement rauque de l’éléphant lui avait répondu, et nous sentîmes notre monture faire un saut en avant et se roidir sur ses jambes de derrière, et nous comprîmes, en entendant renâcler Mahadèva, qu’il luttait contre un ennemi invisible pour nous… et pour augmenter l’horreur de cette terrible scène, de faibles gémissements qui partaient de la broussaille, presque sous nos pieds, nous prouvaient qu’un de nos guides avait été atteint.

En moins de rien, Amoudou, qui marchait à l’arrière avec les bufflones, était à nos côtés.

— Saëbs, nous cria-t-il de cette voix que le danger n’avait jamais troublée, ne quittez pas le haoudah, Mahadèva est attaqué par un tigre.

Avec ses yeux de lynx, le Nubien s’était rendu compte immédiatement de ce qui se passait. Les arbres formaient au-dessus de nos têtes une voûte si épaisse que nous ne distinguions absolument rien ; je dois dire du reste que l’émotion,