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voyage au pays des brahmes.

Arouna avait débité cela tout d’une haleine, et la foule qui, depuis quelques instants, faisait de violents efforts pour se contenir, dès qu’il eut fini, malgré notre présence, se laissa aller à un accès de gaieté tellement franc, que nous eûmes toutes les peines du monde à ne pas l’imiter.

Amoudou, de son côté, trouva la situation tellement comique, qu’il fut obligé de s’appuyer contre un arbre pour ne pas tomber… Si vous n’avez jamais vu rire un nègre pur sang, vous ne pouvez vous faire une idée de la gaieté d’Amoudou ; ses lèvres énormes s’entr’ouvraient jusqu’aux deux oreilles, son nez, peu proéminent du reste, disparaissait entre ses joues contractées, ses yeux se fermaient à demi, la tête entière enfin n’avait plus rien d’humain ; il avait des spasmes de rire qui ressemblaient à des cris de bêtes fauves, et cela durait un quart d’heure avant qu’il lui fût possible de retrouver son calme habituel.

La population de Nandapour, mise en belle humeur, criait et gesticulait en montrant le brahme et le thasildar qu’elle accablait de ses sarcasmes.

Une affaire que je croyais tragique au début allait finir d’une façon plaisante.

Quand Amoudou eut repris son sang-froid, je