Page:Jaëll - L’intelligence et le rythme dans les mouvements artistiques, 1904.pdf/128

Cette page a été validée par deux contributeurs.
122
TOUCHER SPHÉRIQUE ET TOUCHER CONTRAIRE

du toucher, parce qu’on considère le timbre émis à l’aide des pressions comme un phénomène isolé, comme une propriété inhérente à chaque doigt, quand en réalité il s’agit de phénomènes qui n’existent que par leur proportionnalité dont les unités nouvelles du toucher sphérique nous montrent le mécanisme d’une effrayante complexité.

Si le pianiste, lorsqu’il a les mains très froides, est privé à la fois du timbre de sa sonorité et de sa virtuosité, nous voyons à quelle transformation des phénomènes cérébraux cette froideur des doigts correspond dans le toucher sphérique. Dans le toucher artistique de même, le ralentissement forcé des mouvements, l’incertitude, la faiblesse des pressions doit correspondre à un agrandissement des dimensions corrélativement perçues dans l’exécution des intervalles, et ces dimensions nous dévoilent le ralentissement des fonctions cérébrales.

Car, telle que le mécanisme de la sensibilité tactile nous permet d’entrevoir la mobilité extraordinaire des phénomènes cérébraux, l’affinement de la sensibilité correspond à l’affinement de l’intelligence parce qu’il entraîne en principe le rapetissement des formes qui servent à formuler les pensées.

Allant aux conséquences extrêmes de ces rapports, le fait de ne plus rien percevoir de ce qui est visible pour nous, correspondrait à la conception de l’intelligence la plus parfaite.

Les conséquences extrêmes de ces phénomènes paraissent aujourd’hui un non-sens ; peut-être seront-elles explicables un jour.