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JOURNAL OFFICIEL

DU 10 JUILLET 1940

DÉBATS PARLEMENTAIRES

No 42



CHAMBRE DES DÉPUTÉS

16e LÉGISLATURE
SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1940 - COMPTE RENDU IN EXTENSO

Séance du Mardi 9 Juillet 1940.





SOMMAIRE


1. — Convocation de la Chambre des députés en session extraordinaire.
2. — Excuses.
3. — Allocution de M. le président.
4. — Dépôt, avec demande de discussion immédiate, d'un projet de résolution tendant à réviser les lois constitutionnelles.
Renvoi du projet de résolution à la commission du suffrage universel.
Suspension et reprise de la séance.
5. — Discussion immédiate du projet de résolution tendant à réviser les lois constitutionnelles.
Dépôt et lecture du rapport par M. Mistler, rapporteur de la commission du suffrage universel.
Discussion générale : M. Pierre Laval, vice-président du Conseil. — Clôture de la discussion générale.
Adoption, au scrutin, de l'article unique du projet de résolution.
6. — Incident : M. Jean-Louis Tixier-Vignancour, le président.
7. — Renvoi à une commission pour avis.
8. — Dépôt de projets de loi.
9. — Dépôt d'un rapport.
10. — Dépôt de propositions de résolution.


PRÉSIDENCE DE M. ÉDOUARD HERRIOT


La séance est ouverte à neuf heures et demie.

M. le président. La séance est ouverte.


— 1 —

CONVOCATION DE LA CHAMBRE DES DÉPUTÉS

M. le président. J'ai reçu de M. le ministre de l'intérieur la communication du décret suivant :

« Le Président de la République française,

« Vu l'article 2 de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875, sur les rapports des pouvoirs publics,

« Décrète :

« Art. 1er. — Le Sénat et la Chambre des députés sont convoqués en session extraordinaire pour le mardi 9 juillet 1940.

« Art. 2. — Le maréchal de France, président du conseil, et le ministre de l'intérieur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.

« Fait à Vichy, le 7 juillet 1940.

« ALBERT LEBRUN.

« Par le Président de la République,

« Le maréchal de France,
président du conseil,
« PH. PÉTAIN.
« Le ministre de l'intérieur,
« ADRIEN MARQUET. »

En conséquence, je déclare ouverte la session extraordinaire de la Chambre des députés pour l'année 1940.

L'ampliation du décret dont la Chambre vient d'entendre la lecture sera insérée au procès-verbal de la séance de ce jour et déposée aux archives.


— 2 —

EXCUSE

M. le président. M. Jacquinot s'excuse de ne pouvoir assister à la présente séance.


— 3 —

ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT

M. le président. Mes chers collègues (MM. les députés se lèvent), depuis notre dernière réunion, un immense malheur a frappé notre patrie. Chacun d'entre nous a éprouvé une douleur plus forte que toutes celles qu'un Français a jamais eu à connaître. La dignité que nous entendons garder ne nous empêche pas d'avouer la profondeur de cette souffrance.

La Chambre a eu ses deuils particuliers. Notre collège le capitaine Félix Grat, député de la Mayenne, est mort au champ d'honneur le 13 mai. Nous avions souvent, dans notre Assemblée, observé l'ardeur de ses convictions. Le même homme qui, dans son enseignement de la Sorbonne, se consacrait aux recherches les plus ardues de l'histoire, se montrait parmi nous passionné pour la défense du bien public. Il était entré dans la guerre avec un foi brûlante. Au lendemain du jour où vous l'aviez félicité pour sa citation, je l'avais vu tout près de moi, vivement préoccupé du sort de ses soldats, de « ses petits gars », comme il disait, qu'il entraînait dans les missions les plus périlleuses. Dès ce moment, il apparaissait que son admirable courage l'exposait aux pires périls. Il s'était voué lui-même au sacrifice. Il est mort en héros : tous les témoignages qui nous sont parvenus en ont apporté la preuve éclatante. (Vifs applaudissements.)

Le sous-lieutenant Paul Saint-Martin, député du Gers, a été tué le 15 juin, à Toulouse. Mobilisé dans l'aérostation, volontaire du cadre navigant de l'aviation, il avait obtenu, après un stage à Villacoublay, le brevet d'observateur en avion. Il avait été envoyé au centre d'instruction de bombardement de Toulouse. A la veille de son départ en escadrille, l'avion sur lequel il effectuait son dernier vol d'entraînement s'est écrasé au sol.

Emile Laurens, député de Loir-et-Cher, a été blessé le 16 juin, à Blois, où, demeuré presque seul dans la ville évacuée, il remplissait les fonctions de maire. Transporté au poste de secours, il y est mort en pleine