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LE TESTAMENT DU COUSIN RICHARD.

jolie, blanche et rose, comme le sont les Anglo-Saxonnes lorsqu’elles se mêlent de n’être ni sèches, ni revêches.

Machinalement, Lavarède l’avait regardée.

Cent pas plus loin, au carrefour de Châteaudun et du Faubourg-Montmartre, trois voitures se croisaient, venant de côtés différents. La petite Anglaise en évita bien deux, mais ne vit pas la troisième, et elle allait peut-être se faire écraser, lorsque Armand s’élança et, d’une poigne solide, arrêta net le cheval aux naseaux.

Le cocher jura, le cheval hennit, les passants crièrent, mais la jeune personne en fut quitte pour la peur.

Quoiqu’un peu pâle, elle resta fort calme. Et tendant la main à Armand, elle remercia d’un vigoureux shake hand, à l’anglaise.

— Ce n’est rien, mademoiselle, et cela n’en vaut vraiment pas la peine.

Le père et la gouvernante s’approchèrent aussi, et le bras de Lavarède fut fortement secoué trois fois de suite.

— Non vraiment, disait-il avec une modestie tout à fait sincère, il semble que je vous ai sauvé la vie… Cependant, vous auriez eu tout de même le temps de passer : nos chevaux de fiacre sont bien calmes, croyez-le.

— Vous ne m’en avez pas moins rendu service, n’est-ce pas, mon père ? N’est-ce pas, mistress Griff ?

— Certainement, opinèrent les deux interpellés.

— Et j’ai le droit de vous en être reconnaissante. C’est que je n’ai pas beaucoup l’habitude de marcher dans vos rues de Paris, et j’ai toujours un peu peur, surtout quand je cherche mon chemin.

— Puis-je vous renseigner ? demanda très poliment Lavarède.

C’est le père qui prit la parole et tira une lettre de son portefeuille.

— Nous allons chez un notaire.

— Tiens, moi aussi.

— Un notaire que nous ne connaissons pas.

— Parbleu, c’est comme moi.

— Qui demeure rue de Châteaudun.

— Le mien de même.

— Maître Panabert.

— C’est bien son nom.

— Hasard curious.

— Mais providentiel. Souffrez donc que je vous conduise.

Tous arrivent, remettent leur lettre de convocation, et sont introduits dans le cabinet du notaire, sauf la gouvernante, qui attend dans l’étude.