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UN ENFER SCIENTIFIQUE.

Max, ouvrant la marche, les prisonniers sortirent. Déjà, il ne restait plus trace du campement. Les yaks étaient chargés, l’escorte rassemblée autour de San, toujours flanqué des gamins et de leurs panthères.

Cinq minutes encore, et la tente des voyageurs formait le paquetage des bœufs de charge réservés à cet effet. L’athlète jaune attendait ce moment sans doute, car il s’avança aussitôt vers ses prisonniers.

— Vous marcherez tous quatre derrière moi, fit-il d’une voix rude. Mes jeunes serviteurs et leurs fauves me répondront de votre obéissance.

Joyeux, Sourire, les félins encadrèrent le petit groupe, et derrière San, on se mit en mouvement ; les guerriers jaunes, conduisant les yaks, fermaient la marche. Ainsi le Graveur de Prières côtoya le bord du gouffre jusqu’à ce qu’il fût arrêté par le seuil rocheux, qui enceignait le plateau de son rempart triangulaire.

En ce point il s’arrêta, fit face au précipice, puis ramassant quelques pierrailles, il les lança une à une, à des intervalles inégaux, dans l’abîme. Aucun bruit n’annonça que les cailloux eussent rencontré le fond, et cependant le signal fut certainement compris de la garnison de la métropole, car un spectacle étrange, inouï stupéfia les prisonniers.

La falaise dressée au delà du précipice sembla s’animer. Un pan de rocher tourna autour d’une charnière géante, jetant sa masse en travers du gouffre béant ainsi qu’un pont-levis, à l’extrémité duquel une ouverture sombre se montra, soudainement découpée dans la façade de granit.

San la désigna du doigt, et s’engagea sur le pont.

Bravement, le romancier l’imita, suivi par ses compagnes de voyage, par les gamins, Fred, Zizi. Les voyageurs ne pensaient plus. Ils ne voulaient pas songer à l’abîme sombre, dans lequel un pas à droite ou à gauche les eût précipités… Ils allaient, aspirés en quelque sorte par la fatalité, suivant l’énergique expression du grand poète Persan Ar-Moéli.

Le pont est franchi. Dans les traces du géant, tous pénètrent sous le tunnel, naguère décrit par master Joyeux, lequel perce la falaise entre l’entrée secrète et l’avancée du poste A.

Mais à peine y ont-ils pris pied, qu’une chose terrible, formidable, inattendue, se produit. Un déclic sonne dans la masse de la montagne, puis un bourdonnement métallique. On croirait entendre filer les chaînes des ancres à bord d’un vaisseau de guerre.

Des clameurs d’épouvante répondent à ces bruits. San, ses prisonniers, les enfants, se sont arrêtés frissonnants. Ils regardent en arrière, et avant que l’ouverture, qui leur a livré passage, se soit obturée de nouveau, ils