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MISS MOUSQUETERR.

Et Mona secouant la tête, il insista :

— Si nos jeunes dompteurs de panthères étaient près de nous, ils nous diraient sûrement la même chose. Mais voilà. Depuis que ce grand nigaudinos de San s’est mêlé à notre existence, ils n’ont plus l’air de nous connaître.

Et baissant le ton :

— Voyons, Mademoiselle, ne croyez-vous plus à la vertu des tubes violets et indigos que nous nous sommes partagés naguère ?

— Oh ! si, fit-elle doucement ; seulement, Ils sont bien nombreux.

— Nous les exterminerons en plusieurs séances.

— Eh bien, moi, je serais plutôt portée à espérer, dit miss Violet.

— Naturellement, approuva Max. Nous sommes armés ; des armes que nos ennemis ne soupçonnent pas. Nous lisons dans le jeu de San qui ignore tout du nôtre. Au fond, la partie est trop belle… J’ai presque remords de gagner ainsi ; nous jouons en… grecs !

— Nous allons repartir, leur cria la duchesse qui s’était éloignée. San vient de donner le signal. Voyez. Ses bandits ramènent les yaks. L’effroyable promenade de ce matin va recommencer.

En effet, les bandits se remettaient en mouvement, Max se pencha à l’oreille de miss Mousqueterr :

— Maintenant, murmura-t-il, ne songeons plus qu’à lutter contre San. Ensuite, je n’aurai d’autre idée que vous délivrer du serment qui vous étreint. Sera-ce le bonheur ? Je n’ose l’affirmer. En tout cas, ce sera la possibilité de souffrir libres sans esclavage.

Elle fixa, sur lui son doux regard bleu, mais la réponse demeura sur ses lèvres. Des guerriers ordonnaient aux prisonniers de se remettre en selle, sur les yaks qui les avaient portés durant l’étape matinale.

Le convoi se reforma. Master Joyeux, miss Sourire, leurs panthères, entouraient l’athlétique San, semblant s’être constitués ses gardes du corps. Ils ne s’occupaient aucunement de leurs ex-compagnons de route. Pas un geste, pas un coup d’œil à leur adresse. Si Max et ses amis n’avaient été prévenus, ils se seraient demandé sans doute si les gamins ne les avaient pas trompés, s’ils n’étaient point en réalité des fidèles du géant jaune.

Un sifflement strident, prolongé. La caravane s’ébranle. Le campement reste en arrière. Un contrefort rocheux le masque bientôt aux regards.

Et la sente sinueuse, semée de difficultés, se déroule de nouveau à travers des sites rocheux, sauvages, farouches, qui se succèdent telles des visions d’enfer.