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UN ENFER SCIENTIFIQUE.

— Ne téléphonez plus ; nous sommes étroitement surveillés. Vous êtes avertis. Adieu.

Quand les importuns font irruption dans le sanctuaire, les prisonniers se sont de nouveau étendus sur leurs couchettes, non sans cette recommandation sévère à John Lobster, lequel, assis sur sa natte, considère ahuri les allées et venues de ses compagnons.

— Pas un mot de ce que vous avez vu. Sinon…

Il n’y a pas besoin d’en dire davantage. Le gros gentleman a compris, et il s’allonge précipitamment sur sa couche avec un gémissement apeuré.

San est dans le sanctuaire, suivi d’une foule en armes. Le récit des bandits échappés aux coups de Dodekhan a bouleversé tous leurs camarades. Tous se sont précipités dans les traces du géant jaune.

Celui-ci observe curieusement la porte du Réduit Central. Que cherche-t-il ? L’explication du phénomène dont son cerveau obtus ne discerne pas le sens. Les projectiles, tirés du sanctuaire sur le Réduit Central, sont arrêtés au seuil, et Dodekhan, lui, a pu diriger ses balles en sens inverse. Les cadavres, rigides à présent sur le dallage, le prouvent surabondamment.

Les sourcils du géant se sont froncés. Ses yeux expriment une vague inquiétude. Sa vigueur brutale frémit devant la force scientifique dont les ressorts lui échappent.

Un instant, il fait mine de foncer sur l’entrée du réduit ; mais il se ravise. Il a le souvenir du rude contact de l’invisible clôture.

Et affectant un flegme qui est bien loin de son esprit, il place lui-même des gardiens ; à l’abri des colonnes du temple, il fait enlever les morts et se retire majestueusement.

Alors, Dodekhan se penche vers M. de la Roche-Sonnaille :

— Mangeons. J’ai pris tous les vivres laissés par ces drôles.

— Pourquoi manger ?

Le Turkmène a un mélancolique sourire :

— Vivre, c’est gagner du temps… qui sait !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Une large pierre plate, inclinée en avant et soutenue par deux piliers de granit ; la fruste construction adossée à une falaise de basalte perpendiculaire. Au fond, passant à travers la pierre toiture par une encoche ronde découpée dans le rebord, un filet d’eau tombe du sommet de l’escarpement, écume dans un bassin minuscule que sa chute incessante a creusée, puis