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MISS MOUSQUETERR.

du Maître est exécuté. Incendier le poste B, afin de laisser subsister, dans l’esprit de San, un doute quant à ses prisonniers.

Tous deux ont bondi à l’extérieur.

Déjà à travers les croisées, ils discernent les lueurs de l’incendie qui va éclater. Le tout est d’arriver à la tente, avant que le rougeoiement du feu ne soit découvert par ceux qui entourent le poste.

Ils se pressent… Ils se hâtent. Soudain, un grand cri passe dans la nuit comme un hululement d’orfraie.

C’est la clameur terrifiante des Yakoutes annonçant le feu. Et des hurlements se font entendre de toutes parts. Mais les deux frêles créatures sont parvenues à leur tente. Ils s’y engouffrent, pour reparaître presque aussitôt en clamant d’une voix ensommeillée :

— Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce qu’il y a ?

Des ombres qui filent en courant près d’eux, leur jettent cette réponse :

— Le feu ! Les prisonniers ! Le poste B.

Ah ! la flamme a bien travaillé ; à travers la brume, on aperçoit un flamboiement énorme ; la nuit s’éclaire. San apparaît hideux, terrible, furieux, rugissant d’une voix de tonnerre :

— Les prisonniers ! Qu’on les fasse sortir.

Il court. Les enfants se regardent, échangent un regard narquois, puis s’élancent dans ses traces, en lançant des cris aigus.

Avec le chef, ils reviennent vers la cabane. Toute la troupe est là, essayant en vain de maîtriser les flammes. Peine inutile ! L’incendie a été préparé avec trop de soin. Tout flambe à la fois. En deux heures tout est consumé, et parmi les débris noircis, fumants encore, San, une lance à la main, cherche rageusement une trace des prisonniers qu’il pense avoir péri dans le sinistre.

Naturellement, il ne trouve rien ; pas le moindre squelette calciné. Les enfants à deux pas s’amusent énormément en écoutant son soliloque :

— Ils y étaient pourtant. Ils n’ont pas pu s’échapper. D’un côté, mes soldats ; de l’autre, le lac. Ils y étaient donc. Ils y sont. Alors pourquoi ne les trouvé-je pas ?