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UN ENFER SCIENTIFIQUE.

nacelle de l’esquif aérien flottait, un pavillon bleu portant deux signes d’or. Ces signes nous ordonnaient de voter : non.

— Quoi, cet objet… ?

— Décelait, la prodigieuse variété de moyens dont disposent celui ou ceux dont l’étendard bleu est la signature. À ce moment même, mon enfant, celle du comte Ashaki étaient enlevées. Une missive, déposée à notre hôtel par un watman inconnu, nous avisait de l’événement et concluait par cet avertissement menaçant :

« Soumis à mes ordres, la fortune et les honneurs vous attendent. Je ne veux pas envisager une autre hypothèse pour vous. J’ai des otages dont la vie me répond de votre souplesse. »

Un grondement jaillit des lèvres de lord Aberleen.

— Des misérables !

— Depuis ce jour, encouragés d’ailleurs par nos gouvernements, le comte Ashaki et moi fûmes les serviteurs de la volonté du Drapeau Bleu. Sur son ordre, nous traversâmes l’Asie, nous gagnâmes la concession allemande de Kiao-Tcheou. Là, nous pûmes embrasser une fois encore nos enfants. Et puis, on nous enjoignit de reprendre la mer. Des mois s’écoulèrent. Plus de nouvelles, plus rien. Ma Mona est ma seule enfant. Elle était la lumière, la vie pour moi. Négligeant mes intérêts les plus pressants, j’errais à travers le monde, cherchant, cherchant toujours la disparue. Un jour, à Nagasaki, où je me lamentais auprès d’Ashaki aussi abattu, aussi désolé que moi-même, un journal du Tonkin français tomba entre nos mains. Il relatait une attaque de pirates exécutée aux passes de Ki Lua, l’explosion des mines souterraines préparées pour un cas analogue. Que me faisait cela ? Dans l’article, un mot avait brillé à mes yeux comme un éclair, Mona ! Mona, ma fille était à Haïphong, en danger de mort, soignée par Mme  de la Roche-Sonnaille, qui apparaissait pour la première fois dans ma vie. De Mlle  Ashaki, pas un mot.

Néanmoins, le comte s’embarqua avec moi. Nous arrivâmes au Tonkin trop tard. Mona et sa compagne avaient disparu. On supposait qu’elles avaient repris le chemin de l’Europe.

Nouvelles perplexités ! Nouvelles indécisions !

Puis, une information incroyable. Les malheureuses femmes sont en prison à Calcutta sous l’inculpation de piraterie.

— De piraterie ? répéta l’Anglais au comble de la stupeur.

— Oui, ma fille pirate. Comment ? Pourquoi ? Je n’en sais rien. Avec Ashaki toujours, je me rends dans l’Inde. Trop tard encore. Les prison-