Page:Ivoi - Miss Mousqueterr.djvu/291

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
274
MISS MOUSQUETERR.

Le 24, alors que la garnison anglaise de Llaça, capitale du Thibet, célébrait la fête de Christmas, des fanatiques s’étaient introduits dans le fortin où les militaires se croyaient en sûreté.

Ceux-ci furent massacrés, sauf deux jeunes engagés qui parvinrent à s’échapper et rapportèrent la nouvelle du désastre.

Seulement, le gouvernement hindou n’eut pas à intervenir pour punir les coupables.

Le lendemain même, le fortin occupé par les meurtriers sautait, projetant au loin hommes et bastions. Explosion inexplicable, puisque l’ouvrage, non armé encore, ne contenait aucun explosif.

Enfin, le 28 décembre (15 de l’année russe), un escadron d’éclaireurs de Bokhara, campé sur l’un des premiers plateaux montant vers les régions glacées du Pamir avait, lui aussi, été surpris nuitamment, par des ennemis inconnus.

Cette fois, les cavaliers, attachés sur leurs chevaux, avaient été entraînés dans la montagne par leurs ravisseurs.

Ils se désolaient, se croyant déjà réservés aux supplices les plus cruels, quand tout à coup le ravin encaissé parcouru parla colonne s’était éclairé de lueurs rouges ; une détonation formidable avait retenti, et le sommet d’un pic rocheux, brusquement détaché de sa base, était venu obstruer le chemin, non sans écraser sous sa masse le peloton qui ouvrait la marche.

Alors, parmi les ennemis une panique s’était produite. Avec des clameurs d’épouvante, ils avaient fui dans toutes les directions oubliant leurs prisonniers, lesquels s’entr’aidant avaient réussi à se débarrasser de leurs liens et à ramener leurs montures au campement.

Que signifiaient ces incidents étranges, incompréhensibles, dont aucun fonctionnaire ne parvenait à donner une explication logique ?

Et, sur les fils frémissants, les dépêches couraient laconiques et troublantes, chacune apportant un fait nouveau, une anxiété nouvelle.

Du Nord, du Midi, de l’Orient, du Couchant, un vent de mystère soufflait sur la terre d’Asie. Aux quatre incidents très graves rapportés plus haut, des centaines de petites aventures s’ajoutaient.

Ici un résident enlevé. Là, deux soldats allemands du Chan-Toung découverts ligotés et noyés au fond d’une citerne. Puis, un paquet mystérieux arrivait au gouverneur de la colonie avec, à l’intérieur, deux kilogrammes d’or en barre « afin, disait une brève notice, d’indemniser les familles des militaires défunts ».

Et ainsi de suite.