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LES ASSOIFFÉS DE LUMIÈRE.

ville. Je puis être à quatre heures dix du matin à la gare pour le convoi de Vintimille, et, à travers l’Italie, l’Autriche, la Bohême, regagner la petite ville de Stittsheim, où se sont réfugiées les malheureuses que ces horribles Masques Jaunes ont tant fait souffrir.

Sur ce, il rentra à l’hôtel non sans s’être arrêté un moment dans un bureau télégraphique. Il dîna de bon appétit, puis passa au salon, où il se plongea dans la lecture des journaux.

Vers huit heures vingt, on lui apporta une dépêche qui venait d’arriver à son adresse. Il la déplia gravement, et tout aussitôt, il demanda sa note, une voiture. On lui mandait qu’il devait se rendre sans retard à Veynes, sur la ligne de Marseille-Grenoble.

Bien entendu il s’était expédié lui-même ce télégramme, afin de motiver son départ soudain.

À neuf heures, nanti d’une légère valise, achetée par César Landroun, il se faisait conduire à la gare de Veynes, y entrait ostensiblement, allait déposer son mince bagage en consigne, puis rentrait en ville.

Il allait, tuer deux heures dans un music-hall, puis revenait à la gare et s’installait dans le train de minuit cinquante pour Aix et Veynes.

En prenant son ticket, en traversant les salles d’attente, en parcourant les quais, il avait l’œil aux aguets.

La partie grave de son plan de délivrance allait se jouer. Il fallait découvrir l’espion lancé à sa trace, espion dont il devait se défaire.

D’un regard aiguisé il détaillait les rares voyageurs, cherchant l’indice d’un déguisement, d’un postiche trahissant la curiosité qui se cache. Efforts vains. Ni le public, ni les employés ne lui apparurent suspects.

Est-ce que son intuition, cette intuition sur laquelle il avait basé toute la combinaison, lui ferait défaut à l’instant où il en avait un si pressant besoin ?

Cela était énervant au possible. Mais les minutes passaient. Les lourdes aiguilles noires tournaient lentement sur le cadran énorme, s’ouvrant comme l’œil du temps au fond du hall.

Encore une minute, encore trente secondes. Le train va quitter la gare et Max n’a porté ses soupçons sur personne. Au diable ! Il est toujours possible de dépister un espion qui vous suit ; mais encore est-il bon de le connaître. Dépister une personne, dont on n’a pas le signalement devient un irréalisable tour de passe-passe, car alors, il faut se défier de tout le monde.

Mais un voyageur s’avance en courant sur le quai. Il porte une casquette