Mais je tiens à compléter les explications que vous tenez de M. Mariole.
Albert sursauta :
— Vous êtes au courant ?
— À telle enseigne que je vous présente M. Kozets, attaché à la Direction centrale de la police russe.
Il désignait l’agent.
La police russe ! balbutia le représentant de la maison Bonnard, replongé dans l’effarement par l’apparition inattendue d’un policier de l’Empire des Tzars.
Ne vous troublez point de cela, monsieur, reprit le Turkmène ; pour notre part, nous sommes heureux que vous ayez accepté la situation, et désarmé les mains qui se levaient déjà pour vous frapper.
— Vraiment ! des mains se levaient…
— Menaçantes, monsieur, menaçantes… Elles sont toujours autour de vous, prêtes au mal, et si je me fais connaître à vous, c’est uniquement pour vous donner le moyen de n’avoir plus rien à craindre, ni pour vous, ni pour les bons amis, qui ont détourné les fureurs d’un gouvernement apeuré.
Tout à l’heure, Albert se demandait si Mariole, si Tiennette n’avaient pas été victimes d’une mystification ; à présent, il ne doutait plus. L’entrée en scène du policier russe, au type si particulier, l’allure aristocratique de Dodekhan le conduisaient à la certitude.
L’ex-forçat de Sakhaline lui tendait un écrin.
— Qu’est cela ?
— Une fleur de boutonnière que je vous prie de porter.
Machinalement, Albert ouvrit la boîte et demeura saisi.
À l’intérieur était une branche de pin aux feuilles d’émeraudes, aux cônes de rubis.
— Fixez-la, je vous prie. C’est un signal qui signifie, pour les espions lancés à votre suite, que vous acceptez d’être ce que l’on exige de vous.
— Ah !
— Si, avec cela, vous ne dévoilez à personne, à personne au monde, la substitution, tout s’arrangera bientôt, et ni vous, ni vos amis, n’aurez plus rien à craindre… Gardez surtout le secret pour ceux qui vous interrogeront au sujet du port de cette branche de pin à la boutonnière.
— Ce seront des ennemis ?…
— Ou des amis, des adversaires ou des défenseurs. Dans le doute, le mutisme est le salut. À la question, bornez-vous à répondre par ce mot de ral-