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Sulli-. Nous risquerons notre vie pour vous servir, vous ne sauriez rien exiger de plus.

— Bon ! une petite embuscade serait moins dangereuse et plus sûre.

Le Yankee ne continua pas, Francis s’était redressé avec un geste violent. Une seconde, une flamme rageuse brilla dans ses yeux bleus, mais il se domina et ce fut d’un ton calme qu’il répondit :

— Monsieur Sullivan, ne faites plus jamais de plaisanteries pareilles. Je ne répondrais pas de mon premier mouvement. À aucune époque de ma vie, je n’ai attaqué un ennemi traîtreusement. Contre les Indiens mêmes, cette engeance qui nous tourmente tant, nous autres chasseurs, je répugnerais à guerroyer si je ne leur avais annoncé mon inimitié.

Et comme Joë se préparait à répondre, Francis l’arrêta :

— Cela suffit, plus de paroles, il est préférable d’agir.

Puis se tournant vers le patio, il fit entendre un sifflement modulé de certaine manière.

Dix secondes après, l’engagé Pierre paraissait.

Gairon l’appela du geste auprès de lui et lui désignant le groupe qui, entourant Massiliague, se rapprochait peu à peu de l’hôtel :

— Tu vois cet homme.

— Oui.

— Bien. Écoute donc.

Se penchant à l’oreille de Pierre, le Canadien lui parla à voix basse. Le visage de l’engagé s’éclaira, ses lèvres esquissèrent un sourire.

— C’est entendu, vous allez être obéi.

Sur ce, il s’éloigna précipitamment. Quant à Francis, il eut un dernier regard à l’adresse de Massiliague, tout proche maintenant, et avec un haussement d’épaules, un signe imperceptible à Sullivan, il rentra à son tour dans l’hôtel.

Le Yankee demeura seul à la porte du palais Iturbide :

— Au diable ces Canadiens et leurs scrupules, maugréa-t-il. Ils sont capables de laisser échapper le gibier.

Mais frappant du pied la mosaïque du dallage :

— Bah ! je m’en mêlerai… et à moi il n’échappera pas.

À cet instant même, les porteurs du héros du jour