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diens songeaient à la fin héroïque du trappeur inconnu, qui avait lutté sur le plateau qui les supportait tout deux.

Enfin Francis murmura d’une voix indistincte :

— Voilà comment j’ai appris l’existence de la corniche et la possibilité de s’éloigner du Val Noir.

Pierre ne répondit rien.

Bientôt, les deux chasseurs s’enroulèrent dans leurs manteaux et parurent s’endormir.

Aucune alerte ne troubla leur repos.

Le jour vint, et avec lui la certitude que les assiégeants étaient trop nombreux pour que la petite troupe pût espérer se frayer un passage de vive force.

Contrairement à leurs habitudes cauteleuses, les Indiens ne se cachaient point. On les voyait, par centaines, parcourir la plaine au galop de leurs chevaux, avec de grands cris.

De même, sur les rives du lac, des groupes nombreux avaient établi leur campement.

— Ceux-là sont à portée de carabine, s’exclama joyeusement Pierre en les apercevant, je vais les inviter poliment à déguerpir.

Il chargeait son arme, mais l’arrivée de la Mestiza interrompit ses préparatifs belliqueux.

— Amis, dit-elle aux chasseurs, attendez encore. Le sang n’a pas coulé. Peut-être ces Indiens ne seront-ils pas sourds à la voix du messager que je vais leur adresser.

Francis et son engagé échangèrent un regard.

Eux savaient bien que le sang avait coulé, que, volontairement, ils avaient attiré les Apaches sur les traces de leurs compagnons.

Ils ne confesseraient certes pas leur action ; mais l’envoyé qui se rencontrerait avec les Indiens ne rapporterait-il pas la preuve de la pseudo-trahison ?

— Eh bien ? reprit Dolorès étonnée du mutisme des Canadiens, n’approuvez-vous pas ce que je veux tenter ?

Avec effort, Francis bégaya.

— Je vous demande pardon, j’approuve ; mais je pense que les Peaux-Rouges sont les pires bandits qui soient au monde et que, peut-être, notre courrier ne reviendra jamais.

— Celui-là prétend n’avoir rien à craindre. La chevalerie indienne lui est connue ; il affirme qu’il reviendra sain et sauf.