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Heureusement, ni l’un ni l’autre n’étaient sujets au vertige. La sente dangereuse était peu étendue d’ailleurs. Elle permettait de tourner un massif basaltique, puis elle s’enfonçait entre deux hautes parois de rocs, et par une série de gradins, accédait au sommet de la falaise.

Bientôt les ascensionnistes atteignirent le plateau.

À peu de distance les rochers se soulevaient, formant un monticule dont les flancs étaient à pic du côté de la plaine.

— C’est là, fit encore Cœur de Feu en s’arrêtant.

— Là, alors, courons.

Là-bas sur la pente, un flot humain montait avec de rauques clameurs.

Cœur de Feu fit un signe et tous se ruèrent en avant.

Vingt minutes plus tard, les Comanches et Apaches, surpris par cette attaque inattendue, fuyaient dans toutes les directions.

Mais sur le plateau, où ses amis avaient établi leur camp, un triste spectacle attendait Scipion.

Étendue sur des couvertures, à l’ombre de sa tente, la Mestiza gisait toute blanche, inerte, l’épaule enveloppée de linges.

Autour d’elle se tenaient Fabien Rosales, Francis Gairon, Pierre, le domestique de Cigale, ce jeune Coëllo, dont Bell avait parlé naguère a Scipion, lors de leur entrevue à Chicago.

Tous étaient sombres, sauf Coëllo, dont les joues s’étaient couvertes d’une buée rose et dont les grands yeux noirs se fixaient sur le Marseillais avec une expression de joie et de crainte.

Massiliague remarqua la beauté presque féminine de l’adolescent, la grâce de sa tournure ; mais d’autres objets sollicitèrent ses regards.

À quelques pas, le chef mayo, le Puma, entouré de ses Indiens, réduits à six par le combat, se tenaient droits, raides, comme pétrifiés par la douleur que leur orgueil d’hommes rouges leur interdisait d’avouer.

Profondément troublé, le Marseillais s’agenouilla près de la couche de Dolorès. La respiration de la blessée était si faible qu’il ne la perçut pas du tout d’abord.

— Pauvre ! gémit-il… elle est morte.