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Mais la joie éclate dans ses yeux.

Il sait ce que signifient les paroles du chef, et son ambition voit luire dans l’avenir le galon d’or des sous-lieutenants.

De nouveau le commandant interroge :

— Où avez-vous pris contact avec l’ennemi ?

Et le petit sergent répond :

— À trois kilomètres d’ici environ. Il ne se doutait pas de notre présence et marchait en désordre. Le bruit nous a avertis de son approche[1].

— Vous auriez dû revenir immédiatement.

— C’est bien ce que j’ai voulu faire, mon commandant. Mes hommes et moi nous avions commencé à battre en retraite, mais ces coquins nous ont découverts et alors, ma foi, il a bien fallu brûler des cartouches.

— Bien. Avez-vous pu juger de la force de la colonne qui nous attaque.

Le sous-officier haussa les épaules :

— Dans le fourré, c’est bien difficile. Tout ce que je suis en mesure d’affirmer c’est qu’ils sont beaucoup. Il y a peut-être quinze cents, deux mille hommes, peut-être plus, peut-être moins.

Marchand hocha la tête. Il allait ajouter quelques paroles quand une clameur s’éleva.

Il se porta aussitôt vers le retranchement, et, écartant le tireur qui occupait la meurtrière la plus proche, il regarda par l’ouverture.

Les noirs étaient sortis du bois.

Rangés en une masse grouillante, en avant de la lisière, ils se livraient à des contorsions d’épileptiques.

Ils brandissaient leurs armes, les choquaient contre leurs boucliers, injuriaient les Européens.

Le commandant murmura :

— Allons, une première leçon.

Et de sa voix nette qui dominait les vociférations des noirs.

— Attention, enfants, cria-t-il.

Un frémissement d’acier indiqua que la chaîne de tireurs assurait ses armes.

  1. Ce chapitre et le suivant sont extraits d’un rapport officiel, adressé à Londres par S.-T. Talmans, esquire.