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Ils y mélangeaient du sable, une argile rougeâtre découverte à quelque distance, des pierres calcaires, pulvérisées au préalable.

Puis, versant l’eau à foison dans ces creusets improvisés, ils délayaient le tout, obtenant ainsi un ciment grossier, destiné à rejointoyer les troncs d’arbres du retranchement.

En même temps, d’autres équipes entouraient l’enceinte d’un fossé profond de deux mètres, et dont les parois verticales étaient maintenues à l’aide d’un clayonnage de branchages, renforcé d’une épaisse couche de ciment.

Le neuvième jour, le poste de Baguessé était en état de défense.

On y avait transporté les charges, les embarcations démontées.

Les deux petites mitrailleuses dont l’expédition étaient munie avaient été mise en batterie.

Et avec ses meurtrières, ménagées durant la construction, l’ouvrage faisait véritablement bonne figure.

Comme toujours en pareil cas, les officiers voulurent baptiser la redoute.

On proposa unanimement le nom cher à tous :

« Fort Marchand ! »

Mais le commandant, très sensible à cet hommage spontané, n’en obéit pas moins à sa modestie habituelle.

Il la voilà cependant, invoqua la « discipline militaire », mot devant lequel un officier digne de ce nom, s’incline toujours.

Et il répondit doucement à ses compagnons, qui le pressaient d’accepter le parrainage de la nouvelle forteresse :

— Messieurs, cet ouvrage terminé, je l’ai remis en pensée au gouvernement français dont je ne suis que le serviteur. Le ministre appréciera.

Réplique fière dans son humilité voulue.

Ce que Marchand refusait pour lui-même, il l’accorderait quelques mois plus tard à Desaix, dont le nom était appliqué à un fort semblable, établi sur la rivière Soueh, à cent kilomètres à l’est de Meschra-el-Reck.

Maintenant, si l’on veut savoir pourquoi, contrairement à sa coutume, le chef de la mission Congo-Nil avait imposé à ses subordonnés cet énorme surcroît de travail, il faut en chercher la raison dans le rapport que lui avait fait, à son