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La tête dans les mains, rongé par la fièvre de l’impatience, le capitaine songeait.

Tout à coup, une voix joyeuse éclata près de lui :

— Capitaine… un orage !

Et Bernard montrait à l’officier l’horizon chargé de nuages charbonneux.

Cette vue électrisa Baratier.

— Vite, Bernard, mon ami, à l’œuvre et que, dans un moment, tout soit prêt.

Une activité fébrile s’empara de tout le monde. En un clin d’œil les trois pirogues furent chargées.

Les pagaieurs, les porteurs et les soldats y montèrent suivis des chefs.

Et l’on attendit.

De larges gouttes d’eau tombèrent d’abord une à une… Puis, au bout d’un quart d’heure, ce fut un déluge effroyable.

Dans nos climats, on ne peut se faire une idée de la violence des pluies africaines.

Trempés jusqu’aux os, les voyageurs riaient quand même. Ils applaudissaient à l’averse libératrice.

Une demi-heure à peine suffit pour que le bras du fleuve grossît.

Les pirogues flottèrent…

Décuplée par l’espoir, la vigueur des Bouziris fit merveille ; on franchit le banc derrière lequel la flottille s’était trouvée prise comme dans une souricière.

Il y eut cependant un moment de chaude appréhension. Les pirogues touchèrent.

Mais sous l’effort des avirons puissant des pagaies battant l’eau avec rage, les pirogues glissent sur la vase du fond.

On avance, on passe, on a passé.

Deux jours après, ayant repris par l’autre bras du fleuve qui, en dépit de l’apparence, avait partout un chenal navigable, Baratier reconnut la Méré !

Et lorsque la mission Marchand apprit qu’elle avait devant elle une rivière, libre de tout barrage pendant plus de huit cents kilomètres, un frémissement de joie courut et la nouvelle fut accueillie par un puissant cri de :

— Vive la France !… En avant !